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l'opinion, ni n'engage le SORELTRACY MAGAZINE.
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Juin 2019
La Pointe-Aux-Pins, un paradis perdu...
Par Jean Rajotte


Je suis arrivé à la Pointe-aux-Pins à l’âge de 4 ans (1946). Partie d’un univers urbain et asphalté, je suis tombé dans un monde complètement à l’opposé. Mes grands yeux en furent immédiatement ébahis, je n’y voyais que l’immensité, une étendue vaste et quel grand terrain de jeux. J’allais découvrir très rapidement toute la chance que j’aurais de gambader, de courir, de m’amuser et de m’évader dans ce morceau de terre "sans frontières", épié et sécurisé par les grands PINS qui imposaient leur présence. En fait nous habitions un site de villégiature où se côtoyaient les résidents permanents et les estivants, c’est-à-dire, les "vivaces et les annuels"!

Ce fût pour moi les plus belles années de mon enfance, quelque fois la nostalgie m’emporte vers ce lieu champêtre meublé de souvenances, mais disparu à jamais dans la poussière et le minerai polluant.

Il y avait quoi de spécial à la "pointe" pour la qualifier de "paradis" ? En tout premier lieu, la PLAGE avec son sable blanc de farine, les baigneurs, mes amis, espiègles et rieurs, les châteaux et les tracés de routes construits, défaits et refaits, les courses de bateaux fabriqués par nous, les pique-niques improvisés, les vagues écumeuses des "Empress", les feux sur la grève en soirée, à odeur de guimauve et la parade des « bateaux blancs» tout illuminés et fiers qui sifflaient leur joie en passant et repassant à horaire régulier devant la plage à 22 heures pile, durant la belle saison.

Derrière la maison, des boisées nous encerclaient, des chênes-rois et autres feuillus trônaient en maître avec comme sentinelles, les grands Pins. C’est là que se déroulaient les luttes entre cowboys et indiens et les joutes épiques de capes et d’épées à la mode d’Hollywood, entre coupé de la cueillette des petits fruits (mûres, bleuets…), des feuilles de thé sauvages et des glands, concombres grimpants et pets de loups qui nous servaient de munitions dans nos batailles.

Dans un endroit plus clairsemé, un terrain de balle aménagé, c’est là que j’ai développé mon intérêt pour les sports de compétition et le goût de gagner peu importe les activités futures, sportives et autres… « Jeannot lance-la, la balle, attrape-la Péloquin » ! Sur la rue Leon XIII, il y avait le mini-dépanneur saisonnier de M.GREEN, LILY sa fille nous vendait, bonbons à la cent, ‘’chips’’, crème glacée, ‘’pop-sicle’’ et cartes de Baseball. « Aie Richard, dans mon paquet, j’ai la carte de Ted William et Mickey Mantle, té chanceux Rajotte… »

Plus socialement, durant cette chaude saison, notre maison, les fins de semaine, était assiégée par la parenté citadine, de bien belle visite ! Les cousines, les cousins des familles Lesard, Courchesnes, Antaya et les ami(e)s participaient avec entrain à tous les jeux et excursions improvisés. C’est moi qui menais le tout, mais sans m’imposer outre mesure, j’en étais heureux. Le dimanche soir, ils quittaient avec regret, tout en espérant revenir la fin de semaine suivante, mais à la condition que les parents aient récupérés leur énergie et leur patience.

Voilà c’était ça mon "paradis" un royaume terrestre en soi, ou primait une grande LIBERTÉ, presque enivrante. L’air pur du large, le "bon air" nous enveloppait peu importe la saison. Le fleuve sentait bon. La Cie Fer et Titane viendra trop tôt polluer notre univers et y chasser les résidents à tout jamais…une triste histoire !

Évidemment, la saison de l’été demeurait la plus magique, cependant l’hiver possédait ses charmes. La tranquillité revenait après des mois de fébrilité, d’activités et de joyeuses escapades. Nous nous occupions très bien durant la ‘’morte saison; tous les sports de glisse étaient pratiqués. Mais pour moi, le plus beau spectacle hivernal résidait dans la valse un peu lente et gauche des brise-glaces, le ‘’Ernest-Lapointe’’ et le ‘’McClean’’ qui se démenaient sur le St-Laurent gelé "ben dur", surtout dans le bleu glacial du matin. Ils tentaient avec ténacité d’ouvrir une voie aux transocéaniques venus pour la plupart d’un "autre monde" lointain, mais lequel me dis-je? C’est alors que démarrait mon imagination, je basculais alors dans la rêverie, mais ramené rapidement à la réalité par l’odeur de rôtis sur le rond du poêle à bois et le cri de mon père François,
Jean viens manger, tu vas être en retard à l’école.

La Pointe-aux-Pins fut pour moi du bonheur-bonbon à l’état pur. Elle fut habitée par des gens paisibles, détendus, près de la nature et besogneux. Le temps se faisait discret, il s’écoulait que très lentement. En y pensant, aujourd’hui, je pense qu’il voulait momentanément nous oublier, afin que nous profitions le plus possible de la VIE en pleine harmonie avec l’environnement, la nature. Un lieu unique, enchanteur dans la région.

Pointelier à vie

JEAN RAJOTTE

    
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