Les premières écoles
Madeleine B. Lussier et Roland
Plante
Un résumé certes incomplet de
l’histoire de l’instruction au
Québec!
Dès les débuts de la
Nouvelle-France, l’instruction
des enfants a été présente.
Qu’on pense aux Ursulines à
Québec, à Marguerite Bourgeois à
Montréal. Au début du XVIIIe
siècle, seules les trois
principales villes connaissent
le développement de
l’instruction. Dans les
paroisses rurales, en milieu
rural éloigné, faute d'écoles,
les chemins mal entretenus, la
dispersion de la population font
que ce sont les mères qui
doivent enseigner aux enfants,
compensant tant bien que mal
l’absence d’institutions. Il
faut dire que les familles
n’accordent pas beaucoup
d’importance à l’instruction et
que le clergé appuie davantage
la vocation « agricole » que
l’instruction. En général, les
programmes sont minimaux
lecture, écriture e:
arithmétique. Les filles sont en
plus initiées aux arts ménagers.
L’enseignement de la religion
occupe une place prépondérante.
Aucun cours d’histoire, de
géographie.
L'objectif
premier du cours
primaire est bien
plus de former de
bons citoyens
catholiques aux
mœurs exemplaires
que de les préparer
aux études avancées.
Dans un tel
contexte, toutes les
matières servent à
transmettre les
valeurs chrétiennes
aux enfants; par
exemple,
l'apprentissage de
la lecture se
faisait au moyen de
textes dévots. Les
connaissances
acquises y sont
plutôt sommaires
étant donné la durée
réduite des études
qui se limite
généralement à deux
ans pour les hommes
et à quelques années
supplémentaires pour
les femmes qui
doivent assimiler
les travaux
ménagers. |
La majorité des enfants ne
dépassera pas l’école primaire.
Certains enfants privilégiés
fréquenteront l’école
secondaire. Le cours classique
est offert par les Jésuites à
Québec dès 1665. Dès 1668, on
ouvre un séminaire à Québec,
destinés à former les futures
générations de prêtres. On crée
aussi des écoles de métier,
Québec, Montréal et
Saint-Joachim, rattaché au
séminaire de Québec. Sur les
terres du séminaire de Québec, à
Cap-Tourmente, on crée une ferme
modèle où on vient s’exercer aux
métiers de la terre.
Tout au cours du
Régime français,
c'est aux membres
des communautés
religieuses que
revient la tâche de
transmettre les
connaissances
élémentaires aux
jeunes coloniaux. À
ceux-ci s'ajoutent
certains érudits
laïques, tels les
notaires et les
maîtres ambulants
qui exercent surtout
leur profession dans
les régions reculées
de la colonie en
allant d'une
paroisse à une autre
pour dispenser leur
savoir. Pour exercer
le métier, ces
derniers devaient
détenir une
autorisation du
Gouverneur
certifiant leurs
compétences en
matière
d'enseignement ainsi
que faire preuve
d'une moralité
exemplaire. |
La conquête viendra changer tout
cela. Les manuels cessent
d’arriver de France, il y a
pénurie d’outils, d’enseignants.
Le Séminaire de Québec s’ouvre
en 1765 à tout écolier qui
désire poursuivre ses études,
nonobstant son choix de
carrière, laïque ou
ecclésiastique. Les messieurs de
Saint-Sulpice ouvrent le collège
de Montréal en 1773.
En 1787, le gouverneur crée une
commission d’enquête visant à
formuler des recommandations
pour rehausser le niveau
d’instruction des habitants de
la colonie. Ce sont les
premières pierres d’une
structuration de l’enseignement.
À ces principes,
les membres de la
commission suggèrent
que chaque paroisse
de la colonie soit
pourvue d'une école
primaire où l'on y
enseignerait les
matières
fondamentales utiles
à tout citoyen,
telles la lecture,
l'écriture et les
mathématiques. De
plus, chaque comté
serait doté d'une
maison
d'enseignement où
l'on dispenserait
des cours de
mathématiques
appliquées,
d'arpentage, de
navigation et de
grammaire. À cette
structure, une
université d'état,
bâtie sur le modèle
des institutions
européennes,
coifferait le tout
en orientant et en
dirigeant, un peu
comme le ferait un
ministère de
l'Éducation, le
système scolaire.
|
Le clergé, quoique divisé, ne
voit pas d’un œil favorable
toutes ces recommandations et la
création d’une université n’a
pas lieu, le gouverneur ne
voulait pas « heurter le clergé
».
Les pressions du clergé amènent
l’adoption en 1824 de la Loi sur
les fabriques, modifiant le
régime en place. Désormais,
c’est aux curés et aux
marguilliers que reviennent la
construction et la gestion des
écoles primaires. On pourra
consacrer jusqu’à 25% des
revenus au secteur scolaire pour
l’entretien, le fonctionnement
des écoles « au prorata d’un
bâtiment pour 200 familles et
d’un par cent familles
additionnelles qui s’établissent
dans la paroisse » . On a donc
maintenant des écoles
confessionnelles. On modifiera
plusieurs fois cette loi, tant
en matière de financement qu’en
matière pédagogique. Ainsi, en
1832, on porte à 190 jours le
nombre de jours d’une année
scolaire. (Aujourd’hui, on a 182
jours).
On crée le poste
de surintendant de
l’Instruction
publique qui doit
veiller à
l’application de la
législation
scolaire. Il pourra
s’adjoindre des
inspecteurs (Loi des
inspecteurs d’école
1851).
C'est en septembre
1841 que le
Parlement du
Canada-Uni entérine
l'ensemble des
propositions Buller
par l'adoption de
l'Acte établissant
des écoles publiques
pour toute la
province qui
instaure des écoles
communes sans
distinction de
langue ou de
religion, mais qui
permet à un groupe
minoritaire de
revendiquer la
dissidence. Grâce
aux pressions
exercées par les
clergés protestant
et catholique, la
loi garantit et
consacre le droit à
la dissidence pour
les minorités
religieuses.
Par exemple, dans
une municipalité où
la confession
protestante
(catholique) serait
minoritaire, les
anglophones
(francophones)
possèdent le
privilège de
revendiquer des
établissements
dispensant un
enseignement
compatible avec leur
foi religieuse. Du
même coup, ils ont
également droit à
des subsides de
l'État afin
d'assurer le
fonctionnement de
cette institution
dissident. |
Les lois de 1845-46 instituent
des commissions scolaires
Voici quelques informations sur
les premières écoles de Sorel
qui auront trois rôles à jouer :
• « Soutenir le développement
d'un réseau scolaire à l'échelle
du Québec;
• Par le prélèvement obligatoire
d'impôt, appeler le peuple à
participer au financement du
système d'éducation,
• Le caractère démocratique de
la corporation scolaire devait
permettre la participation des
propriétaires fonciers à la
structure scolaire locale et,
par la même occasion, leur
conscientisation aux avantages
que la communauté peut retirer
de l'éducation. »
L’instruction à Sorel
L’école anglaise et l’école
française
Lors de la création de la
Commission scolaire en 1846, il
y avait déjà deux écoles à
Sorel.
L’école catholique était bâtie
sur le côté nord de la rue
George, face au presbytère
actuel. Quant à l’école
protestante anglaise, elle était
située sur la rue Élizabeth, sur
le terrain en arrière de
l’église Christ Church.
Les deux écoles étaient
administrées par le même
secrétaire. Selon Couillard-Després,
les frais d’exploitation en 1846
et en 1847 étaient de « 1777
piastres ».
La première école anglaise de
Sorel fut créée par William
Nelson, le père du docteur
Wolfred Nelson, patriote. Dans
la Gazette de Sorel, en date du
14 février 1795, il annonçait:
Les jeunes
messieurs sont pris
en pension, bien
traités et
promptement
instruits dans la
langue angloise,
françoise, latine et
grecque. |
En 1830, le recteur John Jackson
cède un terrain situé à
l’arrière de l’église anglicane
pour la construction d’une
école. (Source : Walter S.
White)
Faisant suite à la loi de 1824
qui créait les écoles de
fabrique autorisant le curé et
les marguilliers à utiliser le
quart des recettes de la
paroisse pour le financement des
écoles, le curé Jean-Baptiste
Kelly obtint, en 1848, la prise
en charge d’une école ayant une
capacité de 80 places par trois
frères des Écoles Chrétiennes.
Elle était située dans l’ancien
presbytère de l’église
Saint-Pierre.
École anglaise, rue
Élisabeth.
En face de ce presbytère, il y
avait une école pour les filles.
C’est aussi en 1848 que l’on
décida de construire le couvent
Saint-Pierre au coin des rues
George et Phipps. (Source:
Walter S.White)
Le collège classique
En 1868, une souscription permet
d’ouvrir un collège classique
pour 350 élèves. Les professeurs
sont fournis par l’Évêque de
Saint-Hyacinthe. L’espace
manquant, le collège est
reconstruit voisin du cimetière
protestant, sur la réserve
militaire. Les subventions
venant à manquer, le collège est
vendu aux enchères pour y
établir une école supérieure de
langue anglaise, le Lincoln
Collège. Ce dernier ferma ses
portes en 1888.
Le collège fut acheté en 1896
par les Frères de la Charité,
communauté originaire de
Belgique, qui s’occupait des
vieillards et des orphelins. Ils
ont créé à Montréal, le Mont
Saint-Antoine pour y accueillir
les jeunes délinquants et le
Mont Saint-Benoît pour aider les
personnes victimes d’alcoolisme
et y héberger des malades
mentaux.
La communauté en fit un collège
privé qui dispensa des
enseignements de qualité
jusqu’aux classes supérieures.
En 1860, une ère de prospérité
règne à Sorel. Les contrats pour
plusieurs édifices furent mis en
marche. Après le Palais de
Justice en face du carré royal,
on construit le Collège
Sacré-Cœur sur la rue Prince, un
couvent et un hospice sur la rue
George
En 1861, les citoyens passent
une requête pour avoir un
collège classique. Ce n’est
qu’en 1871 que l’évêque donne
son autorisation. Des lettres
d’incorporation en font un
collège classique. Un prêtre et
six ecclésiastiques enseignent à
soixante-dix-huit élèves.
La bâtisse est sur les bords du
Saint-Laurent, rue Ramezay
mesure 90 pieds de long par 30
et possède une belle chapelle.
Sans appui financier, le collège
ferme ses portes en 1885.
L’école des Arts et École
de Mademoiselle Alain
En février 1883, une classe est
logée au coin des rues George et
de la Reine. Ces cours
s’adressent en particulier aux
gens de métiers et aux les
mécaniciens.
Ces cours sont offerts
gratuitement et subventionnés
par le gouvernement. Le
professeur, Monsieur Rouleau,
est un jeune architecte de
talent.
En juillet et en août de la même
année, l’examen des 80 élèves
masculins et féminins de
Mademoiselle Alain s’est tenu au
Palais de Justice en présence de
plusieurs membres du clergé. Son
œuvre est grandement secondée
par Mademoiselle Cardin, une
institutrice de talent.
L’Académie du Sacré-Cœur
La Commission scolaire achète en
1869 l’édifice de la rue Prince
et l’enseignement est confié aux
Frères des Écoles Chrétiennes. (FEC)
Ces religieux se retireront en
1886 et seront remplacés par les
Pères de Sainte-Croix qui, eux
aussi, quittent en 1909.
Le 15 septembre 1909, en
présence du notaire J.B.
Théophile Lafrenière, président
de la commission scolaire, de
docteur Jean-François-Régis
Latraverse, et du Révérend Frère
Philémond S. Papen, un contrat
est signé en vertu duquel, les
Frères de la Charité
dispenseront l’enseignement
primaire au salaire annuel de
250$ par professeur.
En 1909, on compte 500 élèves.
Ceux qui désirent poursuivre des
études supérieures pourront le
faire en s’inscrivant au Mont-Saint-Bernard,
qui est une école privée.
Reconnaissez-vous un des
vôtres?
On peut voir ci-dessous la photo
d’une classe de 1897. Un père de
Sainte-Croix est professeur et
on peut reconnaître Alfred
Plante, debout à l’extrême
droite.
Dr. François Régis Latraverse,
président de la Commission
scolaire
Lors de la fermeture du
Mont-St-Bernard, l’Académie prit
en charge l’enseignement
supérieur avec les religieux du
Mont-St-Bernard.
Vers 1935, la section face à la
rue Prince fut construite. Une
partie du vieux bâtiment est
démolie.
Premiers diplômés du cours
supérieur à l’Académie du
Sacré-Cœur.
Le Mont-St-Bernard
Pour ériger une construction
plus grande, les autorités
achètent, en 1877, une partie de
la réserve militaire pour 1 300$
et empruntent 25 091$ pour y
ériger ce qui deviendra le Mont-Saint-Bernard,
avec le soutien du gouvernement
provincial. Les plans sont
dessinés par l’architecte
Louis-Zéphirin Gauthier
(1842-1922). Gauthier crée
plusieurs bâtiments dans la
région, le collège Sacré-Cœur,
l’église Immaculée-Conception de
Saint-Ours, l’église de
Sainte-Anne et celle de
Saint-Joseph.
Faute de financement, ce collège
est vendu à l’Université Bishops
de Lennoxville pour en faire un
collège commercial anglophone
qui fermera ses portes en 1888.
Les Frères de la Charité
l’achètent pour 12 000$ en 1896.
Le Lincoln Collège est renommé
«Le Mont Saint-Bernard». Ce
collège privé donna des cours de
commerce et de sciences très
appréciés par la population
soreloise jusqu’en 1928.
Le couvent Saint-Pierre
En 1849, la paroisse achète la
maison du révérend John Jackson
au coin des rues Phipps et
George.
Les sœurs de la Providence
fondent, en 1850, le premier
couvent, mais furent rappelées
par Monseigneur Prince, évêque
de Saint-Hyacinthe.
Les religieuses de la
Congrégation Notre-Dame s’y
établissent en 1858. On
construit une bâtisse en 1864,
qui est agrandie en 1867. Elle
comprend une chapelle, un
dortoir, un parloir, une salle
de musique et des classes. Un
incendie détruit le couvent en
1915 et on reconstruira
rapidement une nouvelle bâtisse.
Ce magnifique couvent, qui a
accueilli beaucoup de jeunes
filles de la région, tant au
cours classique qu’à ceux du
scientifique ou général, est
démoli en1979, pour faire place
à des logements.
Les Dames de la
Congrégation Notre-Dame à Sorel
Roland Plante
Collaboration de Madeleine B.
Lussier.
Source :
Roland Plante, Courriel
Saurelois
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