La région de Saurel et
Amsterdam : la stratégie du
« beigne »

Avec la
pandémie et sa conséquence
obligée, le confinement, le
style vestimentaire « mou »
est à l’honneur, surtout la fin
de semaine. Pourquoi se mettre
sur son 36 quand personne ou
presque ne nous regarde. C’est
que pour bien des citoyens au
chômage forcé, en télétravail,
sans oublier les retraités, le « mou »
est presque devenu l’équivalent
des habits du dimanche. Vous
savez, pour les plus vieux, à
l’époque des grosses familles,
quand votre mère vous habillait
avec les vêtements usagés de vos
aînées ou ceux élimés de vos
cousin(e)s plus âgé(e)s, pour la
messe du dimanche ou la visite
du curé. Maintenant, même le « mou »
doit être griffé et le
catholicisme est devenu un truc
pour personnes âgées.
À ce
sujet, je vous raconte une
anecdote sociologique.
Récemment, avant le confinement,
je participais à une cérémonie
religieuse, catholique. À un
moment donné, l’assistance a
entonné le Notre Père en
coeur et compte tenu des
circonstances, avec coeur. Près
de moi, il y avait 2 très jeunes
filles qui nous ont alors
regardés, totalement étonnées en
pensant probablement qu’il ne
devait y avoir qu’une Lady Gaga
pour être connu de tous ou les
Juifs hassidim pour marmonner
ainsi à l’unisson. Vous auriez
dû leur voir la binette quand
ensuite est arrivé le Je vous
salue Marie. Elles n’avaient
aucune espèce d’idée de la
signification même historique de
nos incantations. Deux mondes,
deux systèmes de valeurs qui ne
connecteront sans doute plus
jamais; surtout pas dans le
monde post-pandémie qui se
dessine.
À ce
titre, j’ai un certain malaise.
J’écoutais le compte rendu
hebdomadaire de François Legault
en ce 10 avril 2020, surtout son
discours d’ouverture très
nationaliste, à la limite de
l’indépendantisme. Bon, le
premier ministre étant ce qu’il
est, y incluant son passé
péquiste et malgré sa profession
de foi fédéraliste du début de
mandat, ne soyons pas étonnés ni
dupes. Ceci étant, on discute
souvent à cette tribune de 13 h.
que l’après-pandémie est en
préparation. Cela a du sens et
c’est une obligation des leaders
de toujours voir plusieurs coups
d’avance; quoique les
politiciens on le sait,
possèdent un penchant inné pour
le très court terme
électoraliste… parce que
souvent, implicitement, c’est ce
que nous leur demandons. Là où
j’ai de la misère et considérant
que l’économie du Québec allait
très bien au moment du
déclenchement du confinement,
c’est que le monde de demain
qu’on nous annonce semble se
dessiner par ceux et celles qui
n’y seront pas.
En
effet, je n’ai rien contre
François Legault (62 ans),
Christian Dubé (63 ans) du
Conseil du Trésor ou l’imposant
Pierre Fitzgibbon (65 ans), ministre
de l’Économie et de l’Innovation
et les autres, tous des hommes
qui n’ont pas la réputation de
se soucier de l’urgent dossier
des changements climatiques. Je
ne dis pas que ces gens sont
dénués d’intelligence et de
compétences, mais il ne faudrait
pas réinventer le passé. Pour
l’instant, l’équipe de choc
manque apparemment de jeunes et
de femmes. Il semble donc y
avoir absence (apparente) dans
la prise de décision aujourd’hui
concernant l’avenir, de ceux et
celles qui seront là, demain.
Même le ministre de
l’Environnement semble exclu des
discussions.
Je sais, il y a le court terme
et il est d’une urgence absolue
pour la majorité des entreprises
et des travailleurs. On ne peut
rester confiner éternellement à
vivre aux crochets de l’argent
public qu’il faudra rembourser
un jour. Cependant, la relance
économique post-pandémie ne doit
pas simplement se réduire à
remplir des formulaires pour
mettre la main sur un maximum de
subvention. Elle doit aussi être
réfléchie sur un horizon de très
long terme, plus de 25 à 30 ans,
l’équivalent d’une génération.
À ce titre, j’invite tous les
paliers de gouvernement y
incluant les municipalités à
interroger dans l’immédiat, les
jeunes, notamment les
adolescents, pour connaître leur
vision de l’avenir relativement
au monde dans lequel ils veulent
vivre; surtout que les moyens
techniques existent pour
rapidement le faire.
Des idées pour Saurel, l’exemple
d’Amsterdam
Amsterdam que nous avons eu la
chance de visiter en 2017 est
une ville assez extraordinaire
et particulière, ne serait-ce
que par les centaines de
milliers de cyclistes qui
défilent quotidiennement dans
ses rues. Je sais, Saurel ce
n’est pas Amsterdam même si les
2 villes sont entourées d’eau
avec un accès à un port de mer,
ce qui n’est pas rien comme
avantage stratégique.
Ce qui n’empêche pas une
capitale importante comme
Amsterdam de réfléchir à son
avenir à long terme et à se
redéfinir, même en pleine
période de pandémie. Ainsi, la
capitale néerlandaise vient
d’adopter un modèle de
développement basé sur l’image
du bon vieux beigne que nous
connaissons avec “The
Doughnut Model”.
Ne riez pas, c’est très sérieux
comme le rapporte le
Courrier international dans
son édition française.
Sans entrer dans les détails, le
tout est issu des travaux de
l’économiste Kate Raworth de
l’Université Oxford en
Angleterre qui est qualifiée par
la presse de John Maynard Keynes
du 21e siècle.
Ce n’est pas rien. En résumé,
c’est une façon de voir le
développement d’une ville et
d’une région en intégrant le
volet écologique avec les
besoins de l’ensemble des
citoyens, dans un tout cohérent
et dans sa globalité. Ce qui est
souvent une lacune au niveau des
villes et des municipalités
régionales de comté (les MRC).
Si Amsterdam compte énormément
sur la recherche et le
développement en écologie de ses
entreprises pour son entrée dans
l’ère du « Doughnut
», un des avantages que nous
avons à Saurel, c’est la
présence du
Centre de Transfert
technologique en Écologie
industrielle.
Ce n’est pas rien. De même, nous
pourrions comme ville et région
remettre sur les rails, le
concept d’Agenda 21 local, un
avantage compétitif comme
communauté que nous avions et
qui est tombé dans l’oubli au
cours des dernières années.
Il y a
une réflexion à mener à ce
niveau en nous associant
impérativement notre jeunesse.
Si les changements climatiques
viennent de prendre une pause
salutaire avec la pandémie, ils
ne se sont pas disparus pour
autant. La remise en marche à
court terme du modèle économique
libéral capitaliste prépandémie
si intéressant soit-il pour
notre hédonisme, est aussi le
signe du retour des changements
climatiques. Il faudra faire des
choix pour trouver un meilleur
équilibre entre l’un et l’autre,
à très court terme. C’est devenu
un passage obligé.
Jocelyn Daneau, isolé,
jocelyndaneau@gmail.com |