Legault-Arruda et
le Choix de Sophie
Dans
une chronique précédente —
Isolé
aux quatre vents du CODIV-19
(23 mars 2020) — je vous avais
brièvement mentionné que dans
plusieurs pays — Espagne, Italie
— où la pandémie était difficile
à maîtriser, que les autorités
se retrouvaient devant un
dilemme du type :
Choix
de Sophie.
Une expression populaire qui
tire son origine du roman du
même titre de l’américain
William Styron, que j’ai lu dans
une autre vie, il y bien
longtemps. Une époque aussi
éloignée qu’une galaxie, presque
autant que celle où l’on nous
disait que la pandémie était
maîtrisée.
Le
Choix de Sophie, c’est : « …
le jour où elle est arrivée à Auschwitz
(ndlr : camp de concentration),
un médecin sadique lui a fait
choisir entre ses deux enfants
celui qui serait tué
immédiatement par gazage et
celui qui pourrait continuer à
vivre… » Vous me trouvez
dramatique? C’est pourtant de
cela dont on parle à chaque fois
que le mot déconfinement est
prononcé : c’est le choix du
nombre de morts que l’on peut
socialement tolérer pour
recommencer à vivre comme avant?
C’est le Choix de
Legault-Arruda, un choix
d’insomnie.
Celui-ci, qui procède d’une
démarche complexe de type
politico-scientifique, se résume
simplement à déterminer la date
du début du déconfinement, sa
portée et son lieu. Mais c’est
surtout de déterminer par
arbitrage, le meilleur équilibre
pour minimiser le risque
— le niveau de taux de
propagation du COVID-19 — en vue
de maximiser l’impact
positif sur la vie
socio-économique des Québécois(e)s.
Autrement dit, chaque scénario
de déconfinement est accompagné
de son risque et de ses impacts
en termes de pression sur le
système de santé, mais aussi de
nombre de morts, de résurgence
d’une seconde vague, etc.
Il y
a deux choses qui n’existent pas
dans ces scénarios. D’une part,
le risque zéro, sauf si on parle
de notre mort individuel. Parce
que le risque zéro implique de
mettre la société à l’arrêt
complet, dans le sens le plus
strict du terme. Il faut donc
consentir à vivre avec une
certaine dose de risque, lié au
COVID-19 comme nous le faisons
avec les autres maladies qui
nous entourent. Comme le
rapportait
Québec Sciences :
« Il va falloir
«désapprendre» la peur de la
COVID-19 » que nous a
inspiré subitement le trio
Arruda-Legault-McCann, pour nous
mettre sur pause.
D’autre part, quand François
Legault déclare (21 avril
2020)
en matière de déconfinement : « Donc,
l'idée, là, ce n'est pas de rien
précipiter, c'est d'y aller
graduellement, puis le critère
qui est utilisé, c'est la santé. »
Il est sûrement de bonne foi.
Mais c’est intenable comme
position, c’est comme si le
risque zéro existait. Le fait de
pratiquer la distanciation
sociale ou de porter un masque
sachant qu’il n’est pas toujours
possible de se laver les mains,
c’est une acceptation implicite
qu’il y a un risque d’être
contaminé. Ouvrir les écoles,
les entreprises et certains
commerces, c’est accepter plus
de risque de contamination. Ce
qui est induit ici, c’est
qu’avec l’aplatissement de la
fameuse courbe des cas
contaminés, qui donne de
l’oxygène dans le réseau de la
santé, le gouvernement et donc
son peuple, est disposé à
accepter un certain niveau de
contamination pour rouvrir la
vie socio-économique. Ça aussi,
c’est un Choix de Sophie;
comme les Suédois l’ont fait en
vivant la pandémie en semi-déconfinement
et donc, en acceptant
immédiatement un taux de
mortalité supérieur.
Considérant que le COVID-19 est
un nouveau virus, que son
comportement n’est pas connu,
qu’il sera avec nous un certain
temps (avant l’avènement du
vaccin) et surtout qu’il serait
« plus
contagieux que l’on pensait »,
la décision du déconfinement qui
sera prise renferme on le
comprendra, une certaine marge
d’erreur. Autrement dit, malgré
tous les experts et même si nous
ne sommes pas dans une situation
où il faut « tirer du gun »
pour décider, le Choix de
Legault-Arruda quant au
déconfinement renferme un risque
avec beaucoup d’inconnus.
Surtout que le directeur du
Centers for Desease Control
des États-Unis a
déclaré
que la seconde vague de COVID-19
prévue cet automne, serait
potentiellement plus virulente.
Mais en bout de piste, comme le
dit le bon docteur Arruda : « …
on ne peut pas maintenir une
société enfermée comme ça… ».
En
termes de ce que l’on appelle
l’aversion au risque c.-à-d. de
la capacité à prendre des
risques ou de les éviter, je
dirais que Justin Trudeau
m’apparaît très prudent en
parlant de semaines et de mois
de confinement. Il faut dire
qu’il ne gère aucun système de
santé, qu’il est dans sa bulle
sécuritaire assez loin de la
population et qu’il est assis
sur une montagne d’argent. Je
dirais que François Legault est
dans une position mitoyenne.
Mais on remarque que son passé
d’homme d’affaires le rend
impatient et prend souvent le
dessus dans sa volonté de
vouloir rouvrir l’économie; le
tout étant tempéré par le bon
docteur Arruda, qui nous révèle
chaque jour son caractère
opiniâtre. À l’autre opposé, il
y a Donald Trump. Personnage
sans foi ni loi qui ne pense
qu’à sa réélection et à
l’enrichissement de son clan, il
flatte sa base électorale en
l’appelant quasiment aux armes
pour rouvrir l’économie. « Live
Free or Die » comme ils
disent au New Hampshire.
1 000
soldats
Mon
avis, c’est le vieux fond
séparatiste de François Legault
qui l’empêchait de prendre cette
décision de recourir massivement
à l’Armée canadienne, laquelle
aurait dû être prise voilà
plusieurs jours. Le recours aux
médecins spécialistes était une
très mauvaise idée et le
résultat mitigé obtenu en termes
de réels « Oui, je le veux »
le démontre sans appel.
CHSLD
Un
peu tanné d’entendre les médias
et les bien-pensants de
continuellement faire le procès
de la classe politique
québécoise présente et passée et
des fonctionnaires ou à
s’horrifier de la situation
catastrophique dans les CHSLD.
Je rappelle à tout ce beau monde
que ce résultat honteux est
essentiellement le fruit d’un
choix de société, que nous avons
fait depuis de nombreuses
années. Ce Choix de Sophie,
c’est nous qui l’avons fait,
collectivement, en fonction du
niveau de vie que nous voulons.
À
Saurel
Selon
la Direction de la Santé
publique de Montérégie, il y
aurait 14 cas confirmés de COVID-19
dans Pierre-De Saurel, dont 10 à
Saurel (22 mars 2020).
Alors, quel est le taux réel de
contamination? Selon La Presse
(22 avril 2020) : « Le
ministère de la Santé et des
Services sociaux… a indiqué la
semaine dernière qu’il
s’inspirait d’études anglaise et
française le situant entre 1 et
6 %. »
Réponse : Entre 350 et 2 100
pour Saurel. Entre 500 et 3 000
pour Pierre-De Saurel. C’est
assez spectaculaire comme
résultat et ce n’est pas
l’impression que nous avons
heureusement, à regarder autour
de nous.
Jocelyn Daneau,
isolé,
jocelyndaneau@gmail.com |