Non, Henry
Burris n’a pas couru le marathon
!

Je n’avais pas remis les pieds à
Cornwall depuis la belle époque
des Éperviers de Sorel,
formation de la LHJMQ et pour
laquelle je travaillais, alors
que nous affrontions les Royals.
Voilà que cette ville de
l’Ontario offre maintenant son
marathon depuis trois ans. Pour
faire changement, pourquoi ne
pas l’essayer ?
Mon ami beauceron Marco Poulin
m’accompagne. Pour lui, c’est un
retour à la compétition après
une absence de six ans. Avant
qu’une sérieuse blessure ne
freine son élan, nous avions eu
le bonheur de courir quelques
42km ensemble. Je le sens
nerveux, inconfortable.
Notre aventure débute lors de
notre souper aux pâtes la veille
dans un restaurant de l’endroit.
À notre arrivée, je remarque la
présence d’un groupe de jeunes,
attablés et très enthousiastes.
Après quelques minutes, je jette
un œil sur le groupe. Je confis
à Marco que je reconnais une
personne. J’ai déjà vu son
visage. Je sais qu’il appartient
au monde du sport mais
impossible de l’identifier.
Alors que nous terminions notre
repas et après avoir rappelé à
Marco à maintes reprises que je
le connaissais, j’allume. Il
s’agit d’Henry Burris,
l’excellent ex-quart-arrière des
Stampeders de Calgary maintenant
avec le Rouge & Noir d’Ottawa
dans la Ligue Canadienne de
Football. Alors que les jeunes
s’apprêtent à quitter les lieux,
je vérifie auprès d’un adulte du
lot et celui-ci me confirme
qu’il s’agit bel et bien de
Burris. Quel heureux hasard !
Le départ du marathon est à 7h.
On doit se lever à 4h30 dans la
nuit car nous devons prendre un
autobus au plus tard à 6h, qui
nous amènera 42km plus loin, une
procédure identique à Boston. Il
fait froid, le vent est assez
puissant et on annonce de la
pluie. Ça ressemble étrangement
aux conditions effroyables que
j’avais dû traverser lors de mon
dernier marathon à Hyannis près
de Boston il y a quelques
semaines. Je m’interroge de
nouveau à savoir comment
m’habiller.

Arrivé dans l’autobus, un
coureur s’installe près de moi
et me demande si je suis Daniel
Lequin ? Il précise qu’il lit
régulièrement mes textes. Alors,
débute une conversation qui me
fera découvrir Marian
Jordache, un Roumain,
originaire de Bucarest, installé
à Montréal en compagnie de sa
gentille épouse depuis 12 ans.
Il parle admirablement bien le
français. Je dénote sa grande
gentillesse, son tact et son
honnêteté dans ses propos.
Quelle belle rencontre !
Rendu sur le site du départ, on
gèle. Le vent souffle avec
puissance mais il ne pleut pas.
Au premier kilomètre, je
constate que nous jouerons de
chance puisque le vent, en
angle, soufflera de l’arrière.
Ouf ! Malgré tout, on sent sa
force. Particulièrement lorsque
nous devons traverser quelques
lacs. Avec le facteur éolien,
j’ai vraiment l’impression qu’il
fait 1 degré Celsius !
Le parcours se déroule
essentiellement sur une piste
cyclable, Les paysages sont
magnifiques et j’imagine qu’avec
une belle journée ensoleillée,
nous aurions pu en profiter
davantage. Marco a connu un
départ canon. Sans être un grand
connaisseur, il me semble qu’il
est parti trop rapidement. Alors
que j’arrive au 18e km, je
remarque un coureur au loin qui
s’accroupie. Plus je m’approche
de lui, plus je reconnais Marco.
« Je n’ai plus de jambes », me
dit-il, d’un air découragé. Je
ne peux rien faire. Je lui
conseille de marcher et de
repartir la machine plus tard.
Pour lui, c’est la catastrophe.
Il ne s’attendait pas à cette
réaction de son corps. Alors
qu’une ambulance est installée à
mi-parcours, je me dis qu’il
abandonnera et qu’il demandera
au conducteur de le ramener à
bon port.
Quelques kilomètres plus tard,
je rencontre Terry Sanscartier,
un employé du gouvernement qui
réside à Gatineau. Tout un
coureur et surtout doté d’une
incroyable capacité d’encaisser.
Il a couru un marathon en
Croatie deux semaines auparavant
et a atterri à Dorval deux jours
avant le marathon de Cornwall.
Il ressent le décalage horaire.
Jusqu’à la fin, on se côtoie, on
échange, ce qui rend notre
trajet plus intéressant. J’en
apprends beaucoup sur lui de
sorte que je lui propose de
réaliser une entrevue sur ses
péripéties que je réaliserai
dans les prochains jours. Il me
tirera à maintes occasions. Sa
présence m’aura servi
d’inspiration pour compléter mon
expérience dans l’appréciation.
Après le marathon, je cherche
Marco. Je ne le trouve pas. À
quelque part, cela m’indique
qu’il n’a pas abandonné, qu’il a
pu se relancer. Finalement, il
se pointe. Son faciès traduit à
la fois sa déception et un grand
épuisement. Disons qu’il a puisé
toutes les énergies qu’il
pouvait. Il termine en 4h58. Je
suis tellement heureux pour lui
sauf que ça ne modifie
aucunement son attitude.
Dans l’ensemble, j’ai adoré ce
marathon. Une belle petite
organisation où on a pris le
temps de bien structurer
l’événement. Et comme je le
mentionnais tantôt, le trajet se
veut merveilleux… surtout quand
le soleil peut l’agrémenter.
Ma nuit de sommeil qui a précédé
ce marathon fut
exceptionnellement courte et
malgré tout, j’estime que j’ai
bien planifié ma course. Voilà,
le 95e est dans la poche !
Statistiques de mon 95e marathon
Temps : 4h15
Classement général : 115 sur 172
Catégorie d’âge : 5 sur 7
PROCHAIN MARATHON : Longueuil,
19 mai. (96e)
Daniel Lequin
danielmedaille@hotmail.com
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