LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : mardi 26 août 2014 16:00

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NÉCROLOGIE

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Robert
Barberis-Gervais

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mardi 26 août 2014

Sur ceux qui sèment la division

par Robert Barberis-Gervais

J’ai appuyé le Parti québécois avec sa chef Pauline Marois malgré ses lacunes et ses limites pour des raisons stratégiques, pour ne pas faire le jeu des Libéraux et aussi à cause de l’équipe de gens de valeur qu’elle a rassemblés. Est-ce que je le regrette? Non, je ne le regrette pas. Dans une lutte politique, l'unité et la cohérence des troupes est une condition indispensable pour arriver à la victoire. Il faut donc s'intéresser à ceux qui sèment la division dans le mouvement indépendantiste et analyser les conséquences de cette division qui est une des causes de la défaite du Parti québécois aux dernières élections générales. D'autant plus que cette division rendra le projet indépendantiste irréalisable. Ce n'est donc pas un sujet léger qui ne porte pas à conséquence.

Il faudrait que ceux qui se sont opposés à ce qu'ils appellent le PQ-Marois fassent attention de ne pas trop pavoiser. Car avant le déclenchement des élections pour le 7 avril tout était encore possible. Ce fut une grave erreur de déclencher les élections de façon prématurée. Aux élections du 4 septembre 2102, la division du vote nationaliste en raison notamment des attaques vicieuses de certains "indépendantistes" est en bonne partie responsable de la courte victoire du PQ, minoritaire et incapable de réaliser son programme électoral. Le travail de sape était donc déjà commencé bien avant les élections du 7 avril. Pour sortir de cette situation paralysante de gouvernement minoritaire, Pauline Marois a décidé prématurément de déclencher des élections. On la comprend.

Un coup la décision prise d'aller en élections, je ne pouvais pas prévoir que la campagne électorale serait si mal orchestrée et que la garde rapprochée de Pauline Marois qui contrôlait la campagne et Pauline Marois elle-même donnerait le triste spectacle d'une comédie d'erreurs. Une telle incompétence était-elle prévisible? C’est facile d’arriver après l’échec et de répéter : « Je vous l’avais bien dit. » C'est ce que font certains qui n'ont rien appris de la défaite. Ils devraient comprendre que la division des indépendantistes à laquelle ils ont contribué est une des causes de la défaite du 7 avril. De plus, de nombreux citoyens qui se sont abstenus de voter se sont dit: "Ils n'arrêtent pas de se chicaner, ils ne s'entendent pas, moi je débarque." Et ils sont restés chez eux le jour du vote.

Mais allons jusqu’au bout du raisonnement. C'est une démonstration des utilités de la logique. Si on pense qu’il fallait apporter un appui stratégique au gouvernement Marois pour ne pas faire le jeu des adversaires, il faut en déduire que tous ceux qui n’ont pas apporté cet appui stratégique ont fait objectivement le jeu des libéraux de Philippe Couillard.

Ne parlons pas des faux indépendantistes qui encouragent les divisions et qu'en langage d'espionnage on appelle des taupes. Elles ne sont sans doute pas très nombreuses, mais les taupes existent ça c'est certain car ce serait naïf de croire que le Service canadien de renseignement et de sécurité (SCRS) est inactif. Comme Radio-Canada et La Presse, ce Service a pour but de sauvegarder l'unité canadienne. Le SCRS a même un budget pour financer les taupes. C'est ce que font tous les gouvernements qui ont un service de renseignement et le Canada qui se sent menacé par "la séparation" n'échappe pas à la règle.

Ne parlons pas non plus de tous ceux qui étaient contre le Parti québécois ( qui n'a obtenu que 25% du vote) et qui ont divisé le vote des francophones qui étaient opposés au Parti libéral : la CAQ (23% du vote) et Québec solidaire (8% du vote). Ils ont fait objectivement le jeu des Libéraux (42% du vote). On pourrait dire que le gouvernement libéral est leur gouvernement. Cela semble un sophisme mais pensez-y, c'est objectivement et mathématiquement vrai. Tout comme il est vrai de dire que le vote des anglophones et des allophones anglicisés et canadianisés qui ont prêté serment à la Reine d'Angleterre donne au minimum 25 comtés aux Libéraux provinciaux en partant. Les lecteurs de "The Gazette" et les abonnés à la télévision anglaise, la CBC ou CTV, eux, ils ne sont pas divisés.

Parmi les responsables de la division des votes indépendantistes, il y a ceux qui ont constamment attaqué le Parti québécois en disant qu’il n’était pas suffisamment indépendantiste. Et il y a ceux qui, tout en se disant des indépendantistes, ont attaqué Pauline Marois en passant par Claude Blanchet, son mari. Ce sont souvent les mêmes: ils se coordonnent et se répartissent les tâches.

A mon avis, les adversaires de la gouvernance souverainiste ont poussé Pauline Marois à jouer la carte de Pierre-Karl Péladeau pour démontrer sa foi indépendantiste. Car il est évident que la déclaration le poing levé de Pierre-Karl Péladeau un dimanche matin à St-Jérôme ne cadrait pas avec la stratégie inaugurée par l'annonce d'un livre blanc sur l'avenir du Québec. Pierre-Karl Péladeau ne porte aucune responsabilité dans cette affaire car il se devait de dire qu'il s'engageait en politique pour donner un pays à ses enfants. Mais à quoi bon avoir une stratégie si vous ne la suivez pas.

Ces mêmes soi-disant super-indépendantistes se sont acharné sur Claude Blanchet: ils ont apporté de l’eau au moulin à la commission Charbonneau (le « deal » imaginaire avec Claude Blanchet) et à Radio-Canada (Alain Gravel et l’affidavit : soit dit en passant, ce n’est pas parce que quelqu’un prête serment de dire la vérité qu’il dit nécessairement la vérité, j'en sais personnellement quelque chose). En insistant sur la boulechitte du zonage agricole de l’île Bizard (alors que 30% de l’île Bizard est en friche, quelques hectares utilisés pour construire une maison ne mettaient pas en péril l’agriculture au Québec), ils ont voulu nuire à Pauline Marois en marchant sur les traces du journal "The Gazette" et ils ont réussi à lui nuire.

J'ouvre ici une parenthèse. Comme j'ai beaucoup d'estime pour Elaine Zakaïb qui est d'une grande droiture et qui a fait avec nous la lutte pour obtenir un cégep neuf à Sorel-Tracy en 1979, je n'ai pas aimé que des gens mal intentionnés se soient servis contre elle d'une conversation téléphonique enregistrée anodine où, comme directrice régionale du Fonds de solidarité, elle a demandé qu'on accorde plus d'attention à ses dossiers, ce qui était normal. Quand on se rappelle que Lise Thériault a dit qu'Elaine Zakaïb aurait dû appeler la police, on voit jusqu'où peut aller la partisanerie bête. (Est-ce qu'on va encore revenir là-dessus lors du passage de Tony Accurso à la commission?) Les électeurs du comté de Richelieu ont montré plus de jugement en la réélisant. Est-ce qu’il y a quelqu’un qui pense encore que la commission Charbonneau cherche à nuire aux Libéraux ? Demandez-vous sous quelle influence ont été nommés les membres de la Commission à commencer par France Charbonneau elle-même? Ils ont été nommés sous l'influence de Jean Charest, ça veut tout dire. Peut-on s'étonner qu'il y ait deux poids deux mesures dans la façon de traiter les témoins? Par exemple, après avoir été mis en cause, André Morrow, le mari de Liza Frulla qui a un vaste réseau puisqu'on la voit partout, a pu rapidement s'expliquer tandis qu'on a fait poireauter Guy Chevrette pendant un an lui qui avait été attaqué faussement par le mythomane Gilles Cloutier, le faiseur d'élections municipales clés en mains. Y a-t-il à se surprendre du biais franchement anti-syndical de la Commission?

Mais revenons à notre sujet. Qu’on ne vienne pas dire que je surestime l’influence de ces adversaires de Pauline Marois. Ils ont été lus par les chroniqueurs politiques, par les commentateurs, par les journalistes, par les conseillers politiques, par les députés et ministres, par les stratèges libéraux et par les adversaires du Parti québécois. Tous ceux qui ont constamment attaqué Pauline Marois sur le front de la gouvernance souverainiste comme sur le front de l’île Bizard ont objectivement fait le jeu des adversaires et ont contribué à la défaite du Parti québécois. (Par exemple, certains se sont servis du site web Vigile.net pour semer la division.) Ils devraient être satisfaits puisque c’était leur but. Et bien, ils ont atteint leur but. (Je suis sûr qu'ils se prennent pour de grands patriotes.)

Cela ne veut pas dire que c’est nécessairement une mauvaise chose puisque la défaite oblige le Parti québécois à renouveler son approche de l’indépendance et à se trouver un nouveau chef qui aura su tirer les leçons du passé et particulièrement de ce qui est arrivé le 7 avril 2014.

De retour d'Ecosse, Bernard Drainville est en train de le faire d’une excellente façon puisqu’en effet, le choix est entre le statu quo ou l'indépendance. Quand on tente de résoudre un problème, la façon de poser le problème est d’une importance capitale. Or, ici le problème est bien posé: c’est le choix de rester une province dans le Canada ou de devenir un pays indépendant. Cette façon de poser la question de l'avenir du Québec est un pas dans la bonne direction. Elle oblige les fédéralistes à nous prouver que tout ce qui va mal avec le gouvernement Harper doit continuer. Ou avec le possible gouvernement Trudeau qui est une pâle image de son père. Ou avec le NPD de Thomas Mulcair, qui a déjà été l'avocat d'Alliance Québec qui s'opposait à la loi 101 du Dr. Camille Laurin: je suis sceptique quand j'entends dire que Thomas Mulcair va défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Et vous? Pensez-vous vraiment que l'avenir du Québec, c'est de rester une province du Canada, ce pays faussement bilingue qui a un budget de 260 milliards et qui a comme premier ministre Stephen Harper ou pourrait avoir comme premier ministre Justin Trudeau ou Thomas Mulcair?

Une chose est certaine: tous ceux qui favorisent la division des indépendantistes contribuent à ce que le Québec reste une province du Canada. Ce sont des alliés objectifs des adversaires de l'indépendance du Québec. Quant aux taupes, elles n'ont pas besoin de faire grand chose pour tenter de discréditer les indépendantistes. Certains des alliés objectifs du statu quo qui jouent les justiciers, qui se font les procureurs de la pureté indépendantiste et qui dressent les indépendantistes les uns contre les autres s'en chargent. Le manque de solidarité de ces semeurs de zizanie apparemment vertueux est en partie responsable des divisions chez les francophones qui s'expriment dans la dispersion de leur vote en quatre partis: le Parti libéral; le Parti québécois; la Coalition avenir Québec et Québec solidaire. Pendant ce temps, comme toujours, les anglos allos concentrent leur vote dans le Parti libéral et ont plus de pouvoir que leur nombre ne le justifie.

De toutes façons, pour avoir une idée de la tâche à accomplir, pour faire l'indépendance, pour contrebalancer le vote du West Island, des ex-immigrants et de la région limitrophe d'Ottawa, il faut un appui de 65% des francophones de la grande région de Québec qui ont voté à 57% pour le OUI en 1995...

Robert Barberis-Gervais,
Vieux-Longueuil,
mardi 26 août 2014
barberis@videotron.ca

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