Sorel-Tracy, Automne 2018
Le Centre
Ville de Sorel et ses charmes
passés...
Je vous raconte et dépeint ces
souvenirs avec mon coeur
d’enfant et d’adolescent, car ce
fut une période de ma vie
ineffaçable et marquante. Je
veux la célébrer ensemble.
Beaucoup d’entre vous allez vous
reconnaître dans ce passé, pas
si lointain, le temps n’a pas
d’âge…!
J’habitais
sur la rue Augusta, voisin de
U.CARDIN et FRÈRES, marchands de
disques, dont les tous nouveaux
45tours, de partitions musicales
et de T.V. et face à la salle de
POOL chez Roy où des ados à
l’allure ‘’James Dean’’ se
dandinaient, à l’extérieur, au
son des derniers ‘’hits’’
d’Elvis, Pat Boone, Brenda Lee
et Chuck Berry. Ils reluquaient,
taquinaient les filles qui
déambulaient sur le trottoir,
spécialement les jeudis et
vendredis soirs. C’était soir de
parade et de flirt. Bien mises,
enjouées et ricaneuses, leurs
éclats de voix se mariaient à la
musique sortie des haut-parleurs
extérieurs de la Maison Cardin.
Une fois les ``tours du
carré`` terminés, la soirée se
prolongeait chez Nadeau, au
restaurant Lambert avec une
patate sauce et un coke, tout en
déposant un 10 sous dans le mini
juke box sur la table ou chez
Rheault pour déguster un
‘’musicien’’ à deux, à quatre…
Certains, plus aventureux
organisaient un party improvisé
dans un sous-sol aux lumières
tamisées où Bill Haley and the
comets, les Platters et Paul
Anka les attendaient, sourire
aux lèvres près du
tourne-disque, Hi Teenagers!
Dans les années 50 et 60, le
secteur Centre-ville était très
animé, vivant et stimulant.
Quand je sortais de chez-moi,
tous mes sens étaient à l’oeuvre.
Il y avait un va-et-vient
continuel, les ‘’promeneux’’,
les ‘’magasineux’’, les clients,
les flâneurs, les travailleurs,
les colporteurs et les
marchands. Tout ce beau monde
s’entrecroisaient, se saluaient
et s’arrêtaient pour commenter
la dernière ‘’grosse’’ nouvelle,
sans oublier la ‘’petite’’
rumeur qui courait partout en
ville.
Jeune adolescent, j’observais le
tout avec grande curiosité et
avidité. Cela me plaisait
d’entendre ce brouhaha
quotidien. J’avais l’impression,
malgré mon jeune âge, d’être
partie prenante d’une ville
active et dynamique avec une
‘’couleur’, bien spéciale.
Tranquillement je me faisais
familier avec le ‘’monde’’ des
adultes, j’y aurais ma place un
jour…
J’avais un faible pour le
‘’Vieux’’ Marché, cet édifice
patrimonial solide, aujourd’hui,
EN PARTIE DÉLAISSÉ! Je humais
les senteurs, les odeurs et les
effluves qui se dégageaient et
exhalaient des étals, des
comptoirs et des camions avec
leur bâches tendues. J’aimais
entendre, autant à l’intérieur
qu’à l’extérieur au
rez-de-chaussée les offres
criardes des vendeurs et
l’acceptation argumentée des
acheteurs, souvent de belles
engueulades sur fond de fou
rire, scellaient un accord. Le
‘’Marché’’ devenait le carrefour
des gens de la ville et ceux de
la compagne.
Que de saveurs et couleurs
perdues ! Un délicieux rappel,
qui a oublié les succulents
beignes au miel de M. Labonté et
les cerises de Maskinongé qui
noircissaient nos dents. Un
autre moment fort, fut lorsque
j’ai assisté à mon premier film,
au vénérable et emblématique
Théâtre Eden, 0.40$ pour deux
films avec un sac de chips
‘’Maple Leaf’’ et une bière
d’épinette ‘’La Sorelloise’’ en
sus.
Autre lieu de mon terrain de
jeu, la rue du Roi, lieu de
toutes les parades automobiles
et autres : élections,
enterrements de vie de garçons,
mariages, la St-Jean-Baptiste,
le jour du souvenir et les
gardes paroissiales qui se
pratiquaient. Lorsque
j’arpentais cette artère
‘’Mythique’’, je me sentais
LIBRE et HEUREUX, un peu
‘’roi’’! J’adorais les ‘’quincents’’,
les magasins à rayons, les
5-10-15. Mes préférés le
‘’United’’ avec ses deux entrées
(rues Augusta et du Roi) et le
Woolworth avec sa fontaine et
ses tabourets chromés à fessier
de cuir rouge à l’américaine. Je
mettais déniché un emploi à la
tabagie Weilbrenner, je
transportais des journaux du
vieux Terminus à la tabagie.
Avec ces quelques sous gagnés,
vitement j’allais les dépenser
au Woolworth, les comptoirs des
timbres de collection m’avait
adopté. J’aimais tout de ce
magasin, son plancher parfumé à
la cire, les belles vendeuses,
les comptoirs aux produits
disparates. Le gérant M.
Beauséjour nous laissait
naviguer entre les allées, au
gré de ses humeurs
‘’houleuses’’.
Autre endroits de distraction,
de passe-temps et de plaisirs,
le Carré royal et ses grands
feuillus souverains. Avec ses
bancs blancs et verts massifs,
combien de rencontres fortuites
et d’amourettes se sont
planifiées, dévoilées et
brisées. Si les graffitis,
maintenant envolés, pouvaient
bavarder, nous en saurions
davantage ! Il y avait le
Kiosque central ou l’harmonie
Calixa-Lavalée, sous la baguette
de M. Codling, offrait le
mercredi des concerts, un
rendez-vous incontournable pour
tous les Sorelloi(se)s,
mélomanes dans l’âme.
Au gré des allées notre artiste
local ‘’Pélo’’ sculptait dans
des troncs d’arbre à demi coupés
d’originales oeuvres
artistiques, maintenant
disparues comme plusieurs autres
choses chez nous…Et puis comme
aujourd’hui je transgressais à
tous les jours le règlement
interdisant les bicyclettes, mon
petit côté ‘’rebelle’’ et non
conformiste, je l’ai cultivé et
amélioré avec le temps.
Je vous ai raconté ces faits
anecdotiques, car pour moi, ils
marquèrent en grande partie ma
VIE, ce que je suis devenu
aujourd’hui. J’ai appris à
fraterniser, à partager, j’ai
développé ma confiance et celle
envers l’Humain-pas facile des
fois. J’ai nourri ma CURIOSITÉ
insatiable, celle-ci m’habite
toujours. Je me suis abreuvé de
tout, j’étais très réceptif à ce
qui passait ICI et AILLEURS. Ma
tête se meublait de rêveries les
plus audacieuses et
surprenantes.
Le fait de vivre ‘’en ville’’,
durant ces années d’activité, de
LIBERTÉ, de fébrilité et
d’effervescence, a fait naître
en moi un puissant sentiment de
FIERTÉ et de consolidation de
l’estime de soi, et de mes
voisins et ami(es)s, j’y
travaille encore. Rien ne
pouvait être mieux que ma VILLE
et ses citoyen(ne)s, gros merci
à ceux et celles qui l’ont
construite et façonnée ainsi.
Mon amour était indéfectible
pour cette CITÉ portuaire
ouverte sur le monde avec le vas
et viens des navires d’outre-mer
et de ces marins au langage
(curieux).
Ma ville chérie, une passion
qui m’assiègera toujours. Bon
voyage dans le temps, à bientôt
!
Jean Rajotte |