Jethro Tull toujours actif
Michel Bilodeau - Tiré du Magazine Terra
Incognita
Jethro Tull n'est peut être
pas précisément ce qu'on peut appeler un groupe productif mais
il n'est pas inactif pour autant. Bien au contraire! En fait, la
troupe de Ian Anderson, qui a lancé en octobre dernier son
nouveau cd «The Jethro Tull Christmas Album», passe toujours une
bonne partie de l'année sur la route. Et ce fort probablement au
détriment du travail en studio.
Le
groupe ne semble pas près de mettre la pédale douce puisqu'une
tournée britannique est dores et déjà planifiée pour février
prochain. Un horaire serré qui ne laisse pas grand marge de
manoeuvre aux musiciens mais qui n'a toutefois pas empêché Ian
Anderson, tout comme d'ailleurs son coéquipier Martin Barre, de
concocter des essais solo. Ian Anderson a même profité du
lancement de son «Rupi's Dance» pour mener une tournée solo, «Rubbing
Elbows Tour», aux États-Unis de la fin septembre jusqu'à tout
récemment. Terra Incognita s'est entretenu avec les deux
compères histoire de faire le point.
TERRA INCOGNITA Quelle est
votre première motivation lorsque vous décidez de vous lancer
dans l'enregistrement d'un disque solo? Pourquoi entreprendre
cette démarche puisque que vous êtes le compositeur de Jethro
Tull'?
IAN ANDERSON Eh bien je dirais
que c'est avant tout pour me faire plaisir. Lorsque je travaille
sur un disque solo je n'ai pas à expliquer à quelqu'un d'autre
ce que j'entend dans ma tête ou alors à penser aux autres
musiciens comme je le fais pour un disque de Jethro Tull. Dans
un contexte de groupe je dois composer en pensant à tous. C'est
humain. Il faut que chacun y trouve son compte pour qu'il soit
motivé à travailler. Ce qui me complique drôlement les choses.
Avec un disque solo je reviens un peu à la source. Avant de
faire de la musique je m'étais intéressé à la peinture. Un
artiste qui oeuvre dans le domaine des arts visuels travaille
souvent seul et il n'y a personne d'autre d'impliqué avec lui
dans le processus de création. Il n'a pas d'autres musiciens ou
un réalisateur à impressionner. J'aime beaucoup travailler seul.
Je me sens un peu comme un peintre en studio. C'est un travail
plus intimiste qui me satisfait pleinement. Lorsque mes pièces
sont assez avancées je peux inviter quelques musiciens à venir
ajouter leur grain de sel.
T.I. Vous avez même réalisé
certaines pièces de Rupi's Dance» complètement seul.
l.A. Oui je peux jouer de la
guitare, de la basse, des claviers . Je peux le faire mais je
suis bien loin de considérer que je maîtrise ces instruments. Je
ne suis pas par exemple un maître en matière de claviers. Je me
débrouille assez pour concrétiser mes idées. C'est tout! C'est
le cas de la pièce «Photoshop» que j'ai réalisée entièrement
seul parce que je n'avais pas d'autres choix! C'est la dernière
pièce que j'ai enregistrée et je devais la terminer rapidement
parce que nous étions en même temps dans le processus de mixage
de notre disque de Noël.
« Lorsque j'étais plus jeune
je voulais voir B.B.King en concert parce que c'était une
légende, qu'il avait sa place dans l'histoire. Je pense que
c'est la même chose pour nous.»
T.I. Vous avez préparé une
tournée solo pour «Rupi's Dance» mais seulement pour les États-
Unis. Prévoyez-vous un jour présenter ce spectacle ailleurs?
I.A .:J'aimerais bien mais je
ne pense pas pouvoir être en mesure de le faire. Cela tient au
concept même du spectacle qui est conçu un peu comme un «talk
show» à l'américaine. C'est un mélange de prestations musicales
et de conversations. Il y a une bonne part d'improvisation. A
certains endroits il y a des musiciens locaux invités. Les
américains sont familiers avec cette formule d'émission de
télévision. Ça fait partie de leur culture. Et puis cela demande
à l'auditoire d'être familier avec toutes les nuances de la
langue anglaise pour apprécier ce concert. Si je parlais
couramment le français ou l'espagnol j'aurais aimé le présenter
à des publics francophones et hispanophones.
T.I Avez-vous pensé inviter
votre coéquipier Martin Barre à vous accompagner pour cette
tournée?
I.A .:C' était un peu délicat
comme situation. Je sais que Martin ne se sent pas à sa place
dans le cadre d'une de mes tournées solo mais je l'ai tout de
même invité pour être «politiquement correct», Il a refusé. Je
ne prévoyais pas de réponse positive mais je me devais tout de
même de lui offrir.
T.J De toute façon je pense
que vous allez bientôt vous retrouver pour une tournée. Vous ne
semblez
pas prendre de grandes pauses?
I.A Non, effectivement. 2003 a
été une année assez chargée pour moi. Nous avons enregistré le
disque de Noêl de Jethro Tull et j'ai enregistré «Rupi's Dance».
Entre ça nous avons pris la route avec Jethro Tull et il y a eu
ma tournée. Nous avons déjà des concerts de Jethro Tull de
prévus pour février. Puis nous visiterons l'Inde, l'Amérique du
Sud, l'Europe de l'est. J'ai aussi quelques concerts avec des
orchestres symphoniques de planifiés pour l'été prochain. Nous
sommes actifs une bonne partie de l'année. En fait, je dois
toujours penser un an d'avance lorsque je veux amorcer un
nouveau projet. Je ne veux absolument rien regretter. J'essaie
de faire le maximum. La vie est si courte.
T.l Vous semblez n'avoir aucune difficulté à sillonner le monde
sept ou huit mois par année. Est-ce que cela vous surprend un
peu considérant le fait que vous ne bénéficiez d'aucun support
de la part des stations de radio?
I.A .:C' est toujours surprenant! Heureusement
que nous ne sommes pas tributaires de la radio parce que nous ne
pourrions pas être sur la route comme cela. Je pense bien
humblement que Jethro Tull fait partie de l'histoire du rock et
qu'il a marqué à sa façon les années 70 et 80.
Au fil des ans le groupe s'est acquis une
réputation d'intégrité. On ne se soucie pas des modes.
Musicalement, nous avons toujours fait ce que nous voulions. Ce
qui fait qu'aujourd'hui, sauf erreur, nous en sommes à notre
troisième génération de fans. Je peux comprendre ce phénomène.
Lorsque j étais plus jeune je voulais voir B.B.King en concert
parce que c'était une légende, qu'il avait sa place dans
l'histoire. Je pense que c'est la même chose
pour nous. Les gens profitent de - l'opportunité de nous voir
avant que nous soyons trop vieux!
Michel Bilodeau