lundi 16 décembre 2013
Premiers
résultats des fouilles
archéologies du Vieux-Sorel
Projet
archéologique des Forts de Sorel
Fin septembre-début octobre, une
équipe d’archéologues de la
firme Arkéos inc. a procédé à
l’exécution de la première phase
d’inventaire archéologique dans
le Vieux-Sorel, un projet de
recherche initié par la Société
Historique Pierre-de-Saurel et
qui vise à localiser et à
documenter les vestiges des
différentes générations de forts
érigés à Sorel sous le Régime
français.
Conformément
au programme élaboré, cette
campagne d’exploration a
principalement ciblé
l’emplacement du stationnement
municipal situé en marge ouest
de la rue de la Reine et au sud
des installations portuaires,
soit à l’endroit présumé du
bastion sud-ouest de l’ancien
fort de Saurel (1665‑ca1760) et
sur le site du presbytère de
l’ancienne église de Sorel
(1733-1823).
Les premiers
vestiges de l’époque du fort de
Saurel
D’emblée, les premières
observations faites au terrain
lors de l’excavation des
premières tranchées
exploratoires ont provoqué la
surprise, soufflant le chaud et
le froid et forçant un
réajustement significatif de la
démarche exploratoire planifiée
à l’origine. En effet,
contrairement aux attentes, il
fut d’abord mis en évidence
l’impact important des
aménagements modernes sur les
contextes anciens, notamment le
dérasement significatif du
terrain lors de l’aménagement, à
la fin des années 1920, des
anciennes voies ferrées en marge
de la rive du Richelieu.
Sous les
remblais modernes et
généralement peu profonds,
l’équipe d’archéologues met
néanmoins au jour les restes de
plusieurs bâtiments anciens,
fondations de pierres et de
briques associés aux bâtiments
érigés à cet emplacement au
cours du XIXe siècle, mais
également des indices
d’aménagements nettement plus
anciens, des creusements et
bases de poteaux, des éléments
susceptibles d’être associés aux
aménagements
de l’époque du fort de Saurel et
dont l’exploration justifiait
l’ouverture de nouvelles
tranchées exploratoires.
En marge sud de
l’aire d’intervention, sous le
soubassement d’un bâtiment
relativement moderne, les
fouilles ont ainsi permis de
mettre au jour la base
résiduelle d’une tranchée et
d’un alignement de poteaux dont
l’organisation et les éléments
de culture matérielle (restes de
céramiques et autres menus
objets) permettent d’associer
l’ensemble à un aménagement du
Régime français.
Les restes sont
toutefois fugaces et ne
permettent pas à cette étape une
identification claire,
l’aménagement pouvant tout aussi
bien être associé aux fondations
d’un bâtiment en poteaux en
terre, une technique de
construction typique des
établissements de cette période,
qu’à une composante de l’ancien
fort Saurel. Il s’agit toutefois
néanmoins d’un élément
clef et d’un premier repère
spatial dont l’exploration
pourra certainement servir lors
des prochaines phases de
recherches dans ce secteur.
Le site du presbytère et de
l’hôtel Richelieu (CaFg-7). Vue
vers le nord. La tranchée
excavée lors de la première
phase d’intervention
archéologique dans le
Vieux-Sorel. photo : Alain
Beaudoin
Malgré le dérasement du terrain
au cours des années 1920,
l’inventaire archéologique a
permis la mise au jour de
plusieurs vestiges, dont les
fondations de pierres et de
briques associées à des
bâtiments du XIXe siècle, ici
ceux du presbytère et de l’hôtel
Richelieu.
La base de divers creusements a
été mise au jour lors de
l’intervention archéologique.
Les artefacts récoltés lors de
la fouille manuelle des dépôts
permettent d’identifier de façon
relative la période à laquelle
ces creusements ont été faits.
photos : Arkéos inc.
L’un des faits
saillants des recherches menées
en 2013 tient toutefois dans la
mise au jour des restes d’une
glacière, une fosse
quadrangulaire dotée de parois
de bois, creusée en profondeur
dans le sol naturel et qui
servait à l’entreposage des
denrées périssables.
La fouille des
dépôts en place à l’intérieur de
cette fosse a en effet livré une
quantité importante d’objets
anciens qui permettent
clairement d’associer cet
aménagement typique à une
occupation de la première moitié
du XVIIIe siècle, voire même
possiblement plus ancien. Il
s’agit donc là encore d’une
structure du Régime français,
assurément contemporaine du fort
Saurel, et qui pourrait être
associée au presbytère de Sorel
érigé à cet emplacement au
deuxième quart du XVIIIe siècle
ou une occupation antérieure.
Le traitement
et l’analyse des nombreux objets
recueillis en contexte avec cet
aménagement sont en cours, mais
suscitent d’emblée beaucoup
d’enthousiasme puisque ceux‑ci
présentent une indéniable valeur
documentaire tant pour la
recherche que pour la diffusion.
Les pipes à fumer
en terre cuite argileuse blanche
sont produites depuis
l’introduction du tabac en
Europe et sont très courantes
jusqu’à l’invention de la
cigarette. Ces pipes ont été
fabriquées dans la seconde
moitié du XIXe siècle.
Outre les
éléments céramiques en terre
cuite commune typique des objets
de tables de cette époque, la
fouille des dépôts présents dans
cette fosse a en outre livré
quantité de menus objets
particulièrement évocateurs de
cette période, notamment de
nombreuses pierres à fusil,
balles et sceaux de plomb,
cannelle de tonneau, perles de
chapelets, épingles et boutons,
verre ancien, ossements divers
et autres matériaux ferreux, des
éléments toujours en cours de
traitement.
Les premiers
témoins matériels de
l’occupation du site au cours de
la préhistoire
Malgré
l’éradication de pans importants
des contextes anciens dans le
secteur d’intervention, on
soulignera par ailleurs la mise
au jour des tout premiers
témoins matériels de
l’occupation du site au cours de
la préhistoire, notamment un
magnifique fragment d’une pointe
en chert vert foncé. Les
éléments ont été recueillis dans
des contextes remaniés, mais
confirment incontestablement le
potentiel archéologique
amérindien particulièrement
significatif du site de l’ancien
fort à l’embouchure du
Richelieu, une voie de
communication stratégique de la
vallée du Saint-Laurent,
fréquentée et empruntée bien
avant la colonisation européenne
du territoire.
Vue d’ensemble de
la fosse de la glacière. Les
traces de quatre piquets,
consolidant la paroi est, ont
notamment été mis au jour.
photo : Alain Beaudoin
photo : Arkéos inc.
Un premier bilan
positif qui mène à la
désignation d’un premier site
Bien que la
première phase d’inventaire
menée à l’automne 2013 dans le
cadre du programme de recherche
des Forts de Sorel n’ait pas
permis de reconnaître
explicitement les traces de
l’ancien fort de Saurel, les
travaux n’en ont pas moins livré
les tout premiers vestiges
clairement contemporains de cet
aménagement, dont les restes
d’un alignement de poteaux qui
sont susceptibles d’être
associés à cet ouvrage. Outre
les différents faits saillants
évoqués plus haut, les travaux
menés à l’automne 2013 ont
également permis de poser un
premier regard sur
l’organisation du milieu
naturel, soit sur la composition
et l’organisation des dépôts des
sols anciens, des données qui,
avec les relevés des nombreux
vestiges mis au jour,
permettront de poser un regard
nettement plus éclairé sur la
cartographie ancienne de ce
secteur et d’affiner d’autant la
planification des prochaines
phases d’exploration.
Compte tenu de la
qualité des vestiges et des
témoins matériels mis au jour,
il fut pleinement justifié
d’inscrire cet espace au
Répertoire des sites
archéologiques du Québec sous le
code Borden CaFg-7, une première
pour le territoire du
Vieux-Sorel.
À ce jour, le
traitement et l’analyse des
données recueillies au terrain
se poursuivent en vue de la
production d’un rapport synthèse
qui fera l’objet au cours des
prochains mois d’une diffusion
complète, sous différentes
plateformes, pour le bénéfice de
la population de Sorel-Tracy.
Cette assiette en
terre cuite commune a été
produite au cours du XVIIIe
siècle dans le nord de la
Méditerranée, probablement dans
la vallée de l’Huveaune, près de
Marseille. Les assiettes en
terre cuite commune de cette
période sont des objets peu
courants.
Les cannelles de
tonneau, aussi appelées
robinets, étaient enfoncées à
l’intérieur du tonneau et la
clef la surmontant permettait de
régler le débit du contenu.
Cette cannelle en laiton a été
trouvée dans des contextes de la
première moitié du XVIIIe siècle
et donc, contemporains du fort
de Saurel.
Les pierres à fusil sont une
composante de l’armement de
l’époque, permettant de créer
une étincelle qui allumait la
poudre et expulsait la balle du
canon. Les pierres à fusil
retrouvées sont d’origine
française et/ou hollandaise.
Le site de l’ancien fort de
Saurel était situé à la
confluence de la rivière
Richelieu et du fleuve
Saint-Laurent, deux axes de
circulation majeurs à la
préhistoire. La découverte d’une
pointe de projectile en chert
vert foncé témoigne de la
fréquentation de ce secteur par
les Amérindiens bien avant la
colonisation européenne.
Les
cannelles de tonneau, aussi
appelées robinets, étaient
enfoncées à l’intérieur du
tonneau et la clef la surmontant
permettait de régler le débit du
contenu. Cette cannelle en
laiton a été trouvée dans des
contextes de la première moitié
du XVIIIe siècle et donc,
contemporains du fort de Saurel.
photos : Alain
Beaudoin |