mercredi 20 janvier 2021
« Le
ministre du Travail doit
surseoir à son projet de loi
indigeste », dit
Annette Herbeuval, présidente du
Conseil central de la Montérégie
– CSN
Dans
une lettre ouverte, la
présidente du Conseil central de
la Montérégie – CSN, Annette
Herbeuval, s'adresse au ministre
du Travail en lien avec le
projet de loi 59 sur la réforme
du régime de santé et de
sécurité du travail.
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Alors que l’heure est au
confinement, que les
rassemblements sont interdits et
que tous
les esprits sont occupés par la
pandémie, le gouvernement a
choisi d’aller de l’avant avec
le plus important projet de
réforme du régime québécois de
santé et de sécurité du travail
des quarante dernières années.
Quelle est l’urgence? Que
cherche à cacher le ministre du
Travail au juste? Les conditions
n’étant pas réunies pour un
débat public, serein et
démocratique, il serait de mise
de
reporter la commission
parlementaire qui doit débuter
la semaine prochaine.
Le ministre Jean Boulet promet,
depuis son arrivée en poste, une
réforme en profondeur
des lois encadrant la
santé-sécurité au travail. Le
projet fut annoncé et reporté à
quelques
reprises déjà en raison de la
pandémie. Déposé en octobre
dernier, le projet de loi doit
être étudié en commission
parlementaire les 19, 20 et 21
janvier. Distanciation sociale
oblige, les consultations se
tiendront en visioconférence par
Zoom.
Le projet de loi est volumineux,
plus de 120 pages, et modifie en
profondeur deux lois
majeures. Prétendre faire le
tour de la question en trois
jours est impossible, encore
moins en visioconférence.
D’abord, la commission
parlementaire se fera sur
invitation seulement, des
groupes et
personnes bien choisis par le
ministre. Le temps imparti aux
organisations est
extrêmement court. La CSN, par
exemple, ne dispose que de 10
minutes pour se faire
entendre. C’est bien peu pour
commenter un projet de loi qui
aura des impacts majeurs
et différents selon les secteurs
et qui aura aussi des impacts
sur la vie au travail de ses
membres.
De plus, des pans entiers de la
population n’auront pas voix au
chapitre. La plupart des
groupes communautaires oeuvrant
auprès des victimes d’accidents
de travail ou de
maladie professionnelle ne
seront pas entendus. Aucun
groupe de femmes non plus,
même si le projet de loi propose
des changements qui affectent
particulièrement les
femmes et même si le ministre
ose qualifier son projet de loi
de « réforme féministe ».
Évidemment, les experts reconnus
dans le domaine depuis fort
longtemps n’ont pas été
invités par le ministre à
commenter le projet de loi. Fort
probablement parce que leurs
avis ne vont pas dans le sens de
ce dernier.
Le sujet est trop important et
touche trop de gens pour être
expédié rapidement sans
débat de fond. Les consultations
sur le projet de loi doivent
être reportées et élargies
pour permettre à plus
d’intervenants de se faire
entendre et aux gens qui le
souhaitent
d’y participer en personne. La
pandémie ne doit pas servir
d’excuse pour bulldozer les
protections en santé et sécurité
des travailleuses et des
travailleurs du Québec.
Le PL 59 comporte des reculs
majeurs. Seule la CNESST y gagne
puisqu’elle se verra doter
de pouvoirs supplémentaires.
Rien sur la judiciarisation qui
sclérose le secteur des
accidents de travail et des
maladies professionnelles depuis
des décennies. Au contraire,
on rajoute des leviers qui
viendront complexifier davantage
un parcours sinueux vers une
reconnaissance d’une lésion
professionnelle.
Alors que la CNESST se gargarise
chaque année quant à la
réduction du nombre
d’accidents de travail, rien
n’est plus loin de la vérité.
Les travailleurs et les
travailleuses
du Québec le voient avec les
augmentations fulgurantes de
leurs assurances collectives,
car ils n’en peuvent plus de la
répression subie s’ils osent
déclarer leur accident auprès de
la CNESST. Ils se tournent alors
vers les assurances collectives
et la CNESST s’en lave les
mains.
Et le ministre se permet de
rajouter à ce projet de loi
indigeste qu’il compte faire des
économies de 4,3 milliards de
dollars de façon cumulative sur
10 ans tout en baissant,
encore, les cotisations des
employeurs dans certains
secteurs.
Le projet de loi 59 devrait
avoir comme seul objectif de
protéger davantage les
travailleuses et les
travailleurs de l’insouciance de
leur employeur en leur assurant
des
milieux de travail sains et
sécuritaires. Monsieur le
ministre, ils ne méritent rien
de moins,
mais vous manquez lamentablement
ce rendez-vous qui est
fondamental pour des
milliers de personnes.
Annette
Herbeuval, présidente
Conseil central de la Montérégie
– CSN
19 janvier 2021 |