De l’électrique
au cosmétique : une question de
vision
« Ils ne
savent pas où ils vont. Ils
n’ont pas de vision. »
Combien de fois ai-je entendu
cette phrase lapidaire à propos
de nos politiciens ou de mes
patrons?
De façon
générale, savoir où l’on va
(même dans nos vies
personnelles), « Donner
du sens à un budget », à
un événement ou avoir de la
vision n’est pas quelque chose
de facile. Une fois que l’on
s’est entendu avec soi-même, il
faut partager le tout avec
autrui. Il y a un donc un effort
consensuel et de persuasion
énorme à consentir. Je vous
invite donc à faire une très
brève incursion relativement au
concept de
VISION.
C’est un voyage
dans l'abstrait et la rigueur où
il faut avoir les pieds bien
ancrés dans la réalité et
l’action.
Ma vision coup de
cœur? Le « Maître
chez nous » de Jean
Lesage en 1962. Trois simples
mots qui adressent un contexte,
une direction et un objectif
mesurable traduit par des
actions, la nationalisation
complète de l’électricité et
l’émergence d’Hydro-Québec,
fondée en 1944. Mais ce « Maître
chez nous » était beaucoup
plus. Il transportait un rêve,
un imaginaire d’épanouissement
pour des milliers d’hommes et de
femmes englués à divers degrés
dans de multiples carcans, des
conséquences de la défaite de
1763 à un catholicisme et un
duplessisme qui ne donnaient
plus de sens.
En 2012, le
mouvement souverainiste ne
transporte presque plus de rêve;
morcelé qu’il est de gauche à
droite, selon les circonstances
et la direction des vents. Cette
absence de vision est devenue
son principal problème depuis
octobre 1995. Faute de
renouveler notre imaginaire
collectif par un projet
mobilisateur de société, il se
contente maintenant d’objectifs
électoralistes à la recherche
d’un « maître » et d’un
« Maître chez nous 2.0 ».
Une vision est un
rêve réalisable par des hommes
et des femmes quelques fois
extraordinaires mais
quotidiennement ordinaires. Une
vision est une émotion. Elle
transporte un message qui
stimule l’action et
l’engagement. Une vision est
telle que l’on en saisit
immédiatement la portée et le
sens. Elle est autonome en
elle-même. Une vision est
réalisée lorsque l’on peut en
mesurer formellement le résultat
sur le plan financier, visuel ou
par le témoignage d’un tiers.
Une vision est
transportée par une personne ou
un groupe crédible. Sans
crédibilité, une vision si
stimulante soit-elle, risque de
s’échoir sur les rives de
l’indifférence. Il ne suffit pas
de dire : « Je suis »
pour automatiquement, « Être ».
Une vision n’est
pas un énoncé de « mission »
qui lui, porte sur l’activité
principale d’une organisation
(ex. :
Azimut Diffusion). Ce n’est
pas un système de valeurs ni une
idéologie. Un énoncé de vision
est court, entre 10 et 15 mots,
pour que tous puissent le
retenir aisément. Une vision ne
découle pas d’un plan
stratégique ou d’affaires, c’est
l’inverse.
Au niveau
politique, le concept de vision
est souvent utilisé comme un « buzz
word » c.-à-d. comme
slogan circonstanciel et
éphémère, traduisant l’intention
du moment. À Sorel-Tracy, cet
outil socialement porteur est
quasi absent, sauf pour l’Agenda
21 local. Dans ce dernier cas,
la vision proposée ne
respecte pas les critères
proposés ci-haut.
Essentiellement, il s’agit d’un
énoncé de 42 mots éclatés qui
emprunte la définition de
développement durable par le
biais de synonymes. Cette vision
soulève plus de questions
qu’elle ne donne de direction.
De même, l’Union
des Municipalités du Québec
dévoilait le 23 novembre 2012,
son
Livre blanc Municipal. Je
vous invite à lire
sa vision pour le développement
de nos villes en 102 mots
(p.32). S’agit-il d’un énoncé
qui respecte les conditions
précédentes? Posez la question,
c’est y répondre.
L’entreprise
privée fait appel abondamment au
concept de vision, surtout à des
fins de marketing. En ce sens,
cette notion évolue selon les
valeurs et les besoins des
consommateurs. Pour Walmart, sa
vision au début des années 80
était : « Nous deviendrons le
magasin général de l’an 2000 ».
Ensuite, c’est devenu : « Donnez
la chance aux gens ordinaires
d’acheter les mêmes produits que
les riches ». Actuellement,
la vision de Walmart est surtout
un slogan de vente : « Économisez
plus. Vivez mieux ».
Mon coup de cœur,
côté entreprise privée? « Donner
des opportunités illimitées aux
femmes » des cosmétiques
Mary Kay. Cette vision est
tellement puissante qu’elle
traduit deux rêves en un énoncé.
Premièrement, elle suggère aux
femmes de se joindre à son
réseau de représentantes et de
s’épanouir financièrement.
Deuxièmement pour les clientes,
c’est la promesse d’un
imaginaire de beauté éternelle.
Construire une
vision pour le futur de
Sorel-Tracy relève d’un double
défi. D’une part, à l’aide des
balises qui précèdent, c’est
celui d’aboutir à un résultat
stimulant. D’autre part, c’est
de stimuler l’imaginaire d’une
population vieillissante dont
l’avenir à juste titre, se
résume souvent à des besoins de
sécurité physique et alimentaire
ainsi qu’à la disponibilité des
soins de santé.
En terminant,
voici quelques énoncés de vision
pour Sorel-Tracy, certains sont
construits au fil de mes
chroniques. Je vous invite à les
améliorer.
En 2021, Sorel-Tracy sera la
première ville carboneutre au
Canada
dans le cadre d’une chronique
sur l’Agenda 21 local.
À Sorel-Tracy, la lecture est
sur le bout des doigts,
concernant notre réseau de
bibliothèques.
Sorel-Tracy : ville d’arts,
d’eau et de fleurs, une
version améliorée de l’énoncé
présenté dans le cadre de la
récente campagne référendaire.
Sorel-Tracy :
vivre ensemble ici, heureux et
prospère
- C’est l’inspiration du
moment!
Sorel-Tracy :
cité des sports et des loisirs,
sans âge.
Sorel-Tracy : …
Jocelyn Daneau
jocelyndaneau@gmail.com
LE
texte de référence sur le
sujet :
Building Your Company's Vision,
James C. Collins et Jerry I.
Porras, octobre 1996. |