Des casseroles
et des carrés en tissu blanc « infirmière »
Commençons par
quelques chiffres, 2013-2014
Le budget du
Centre de santé et des services
sociaux Pierre-de-Saurel (CSSSPS)
est de
114,7 millions de $ *. La
population desservie, assimilée
à celle de la MRC Pierre-de-Saurel
est de
50 317 personnes. Ce qui
donne une dépense
approximative de 2 281 $ par
habitant.
Au Québec, la « Santé
et les services sociaux »,
c’est 31,26 milliards de dollars
pour soigner
8 054 756 Québécois (49% de
nos impôts). En éliminant la
part du CSSSPS, la
dépense par
habitant est de 3 867 $.
D’où
l’arithmétique simple suivant
En terme de
services direct, chez nous, en
« santé et services sociaux »,
aurions-nous un manque à gagner
de l’ordre de 79,8 millions de
$, c.-à-d. 1 586 $ par
habitant?
D’où un « déficit »
récurrent et annuel, lequel nous
amène dans deux directions
« Éloigné » :
il s’agit des services que nous
obtenons, mais qui ne sont pas
disponibles ici. Exemple : les
traitements de radiothérapie.
Nous sommes surtaxés pour ces
services. En plus des impôts « normaux »
que nous payons, nous encourons
des coûts supplémentaires,
notamment celui du temps et
du transport, sans oublier
l’incertitude de l’éloignement.
Quelle partie du manque à gagner
des 79,8 M$, ces services
couvrent-ils? Mystère.
« Brouillard » :
C’est la partie du 79,8 M$
susceptible de nous échapper. Il
faudrait une enquête minutieuse
pour en connaître la valeur.
Globalement,
en avons-nous pour 79,8 M$? Le
mystère s’épaissit!
En parlant
d’en avoir pour notre argent
Selon le
7e Palmarès
des urgences du journal
La Presse, la
performance de
l’Hôtel-Dieu de
Sorel-Tracy en
2011-2012, c’est une 40e
place sur 44 hôpitaux.
Globalement, du moins
depuis 2006, notre
résultat « Urgence »
n’est pas glorieux.
En terme de médecin de
famille, nous avons
un ratio famélique de UN
pour 2 538 habitants,
l’un des plus faibles de
la Montérégie, sinon du
Québec. Pourtant, les
gens qui attendent
inhumainement debout au
froid et en ligne, pour
accéder à la clinique
d’urgence sur la rue
Hôtel-Dieu, sont des
citoyens à part entière,
des hommes et des femmes
qui payent leurs impôts.
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Bref, notre
performance « Medecine de
première ligne » n’est pas
reluisante. D’une part, nous
sommes les cancres de la classe.
D’autre part, ce qui est
beaucoup plus grave, nous y
sommes depuis fort longtemps.
Pourquoi
alors, n’entendons-nous pas le
tintamarre des casseroles?
Pourquoi personne
ne se plaint, sauf assez
discrètement et
occasionnellement? Pour obtenir
une réponse, il faut chercher du
côté d’un économiste
socialiste :
Albert Hirschman. Ce
dernier a élaboré une théorie
devenue célèbre sur les
comportements quotidiens des
consommateurs en situation de
mécontentement. Essentiellement,
ceux-ci oscillent entre « Prise
de parole » et « Défection ».
Dans le cas qui
nous occupe, si peu de personnes
se plaignent, serions-nous alors
dans un cas de « Défection »?
Impossible, la maladie ne prend
jamais congé. Alors quoi?
Une
hypothèse : la médecine à 2
vitesses n’existe pas
Précisément, elle
n’existe pas dans la MRC
Pierre-de-Saurel, lieu
géographique enclavée aux
allures et à la mentalité de
village gaulois retranché. Ce
qui semble exister, c’est une
médecine à 5 vitesses. Eh
oui, si personne ne se plaint de
notre médecine de première ligne
tiers-mondiste, c’est que les
citoyens ont développé des
alternatives.
Vitesse « 1 » :
Tous les gens directement
impliqués dans le système de
santé qui se soignent entre eux
par échange de services.
Verrait-on une infirmière
quitter inopinément son service
pour venir attendre de longues
heures à l’urgence avec son
enfant?
Vitesse « 2 » :
Tous les gens qui ont des
contacts dans le système de
santé et qui en profitent pour
avoir un rendez-vous ou un
privilège quelconque. SVP, ne
soyons pas hypocrites.
Vitesse « 3 » :
Tous les gens qui ont
suffisamment d’argent pour
ignorer le système public.
Vitesse « 4 » :
Tous les gens qui comme moi, ont
la chance d’avoir un médecin de
famille. Le problème, c’est
qu’il n’est jamais disponible à
moins de l’avoir prévu 6 mois à
l’avance, dans un
Québec supposément en surplus de
médecins.
Vitesse « 5 » :
Les autres, soit
40% de nos concitoyens
c.-à-d. 20 000 personnes.
Qu’ont-ils fait de spécial pour
mériter un tel traitement de
citoyen de seconde zone?
Si ça existait, on l’aurait
Pas besoin
de faire un sondage coûteux
pour identifier des pistes
d’amélioration en matière
d’accès aux services de première
ligne. Ce qui précède est
suffisant.
De même, de tout
temps, les employés travaillent
TOUJOURS dans le système que la
gestion (les « boss »)
détermine? Donc, arrêtons de
chercher des coupables et des
défaites auprès des syndicats,
des coupures de 4,6 M$, du
vieillissement ou je ne sais
quoi. Adaptons-nous et
innovons.
D’où l’heure
des responsabilités, des
objectifs et du rendre compte
Il est temps que
ça change. Dans ce domaine comme
d’autres, la MRC Pierre-de-Saurel
doit viser l’excellence.
À résultats
médiocres, il faut donner des
objectifs ambitieux aux
responsables.
Qui sont-ils,
ceux qui ont les mains sur les
manettes? Madame Martine
Bouchard, nouvelle directrice
générale du CSSSPS avec un
contrat de 4 ans, monsieur André
Lussier, de nouveau président du
conseil d’administration du
CSSSPS et madame Élaine Zakaib,
nouvelle députée (et ministre)
du comté de Richelieu.
Quels
objectifs leur fixer?
Le 31 décembre
2016, la performance du CSSSPS
devra se situer au
minimum, au-dessus de la moyenne
québécoise pour l’ensemble des
activités liées à la médecine de
première ligne.
La confiance
n’exclut pas le contrôle.
Les nouveaux
responsables du CSSSPS doivent
avoir l’obligation formelle au
31 décembre de chaque année, de
rendre compte à la population
concrètement et
simplement, de leur
performance, chiffre à l’appui.
Le tout devrait
commencer immédiatement avec la
publication par le CSSSPS, d’un
état de la situation. Il n’y
rien de mieux que se mesurer au
départ et à l’arrivée. Parce que
hors de la mesure, point de
salut. C’est le prix de la
confiance.
Quoi? Le
CSSSPS a déjà publié
son rapport annuel, 2011-2012.
Voyons voir.
Ce volumineux
rapport (70 pages) ne donne
aucune indication en regard de
l’état de la performance ci-haut
mentionné. D’ailleurs, le mot « famille »
y apparaît seulement deux fois,
l’expression « médecins de
famille » est presque
ignorée avec une seule mention
et « Patient » a droit à
6 mentions.
Le mot « gestion »
y figure plus de 50 fois et « comité »,
plus de 130 fois.
Groupe de
médecine familial? Inconnu.
D’après vous, y
a-t-il des priorités à revoir?
De là, une
suggestion en guise de
conclusion
Si vous n’avez
pas de médecin de famille ou si
vous êtes insatisfaits des
services offerts en médecine de
première ligne, portez un carré
en tissu blanc "infirmière".
Jocelyn Daneau
jocelyndaneau@gmail.com
* Le Rapport
annuel 2011-2012 du CSSSPS
indique à l’état des résultats,
une dépense d’exploitation
totale pour l’exercice terminé
le 31 mars 2012, de
114 749 240$. Ce montant est
utilisé comme référence pour le
budget 2013-2014 à la place du
montant de 107 M$ rapporté dans
les
2 Rives du 8 mai 2012.
** Durée
moyenne du séjour : C’est le
nombre d’heures que le patient
passe sur une civière aux
urgences avant d’obtenir son
congé ou d’être hospitalisé dans
une chambre ou d’être dirigé
ailleurs. Classe des hôpitaux
territoriaux de moins de 10 000
civières.
Il semble que ce
résultat ne tient pas compte des
gens qui quittent l’urgence,
excédés par les délais
d’attente. |