LE SORELTRACY MAGAZINE     *  Dernière mise à jour : mardi 12 février 2013 13:17

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NÉCROLOGIE

NOUS JOINDRE



           
LA CHRONIQUE, DE JOCELYN DANEAU

mardi 12 février 2013

Des casseroles et des carrés en tissu blanc « infirmière »

Commençons par quelques chiffres, 2013-2014 

Le budget du Centre de santé et des services sociaux Pierre-de-Saurel (CSSSPS) est de 114,7 millions de $ *. La population desservie, assimilée à celle de la MRC Pierre-de-Saurel est de 50 317 personnes. Ce qui donne une dépense approximative de 2 281 $ par habitant

Au Québec, la « Santé et les services sociaux », c’est 31,26 milliards de dollars pour soigner 8 054 756 Québécois (49% de nos impôts). En éliminant la part du CSSSPS, la dépense par habitant est de 3 867 $. 

D’où l’arithmétique simple suivant 

En terme de services direct, chez nous, en « santé et services sociaux », aurions-nous un manque à gagner de l’ordre de  79,8 millions de $, c.-à-d. 1 586 $ par habitant? 

D’où un « déficit » récurrent et annuel, lequel nous amène dans deux directions 

« Éloigné » : il s’agit des services que nous obtenons, mais qui ne sont pas disponibles ici. Exemple : les traitements de radiothérapie. Nous sommes surtaxés pour ces services. En plus des impôts « normaux » que nous payons, nous encourons des coûts supplémentaires, notamment celui du temps et du transport, sans oublier l’incertitude de l’éloignement. Quelle partie du manque à gagner des 79,8 M$, ces services couvrent-ils? Mystère. 

« Brouillard » : C’est la partie du 79,8 M$ susceptible de nous échapper. Il faudrait une enquête minutieuse pour en connaître la valeur.  

Globalement, en avons-nous pour 79,8 M$? Le mystère s’épaissit! 

En parlant d’en avoir pour notre argent

Selon le 7e Palmarès des urgences du journal La Presse, la performance de l’Hôtel-Dieu de Sorel-Tracy en 2011-2012, c’est une 40e place sur 44 hôpitaux. Globalement, du moins depuis 2006, notre résultat « Urgence » n’est pas glorieux.

En terme de médecin de famille, nous avons un ratio famélique de UN pour 2 538 habitants, l’un des plus faibles de la Montérégie, sinon du Québec. Pourtant, les gens qui attendent inhumainement debout au froid et en ligne, pour accéder à la clinique d’urgence sur la rue Hôtel-Dieu, sont des citoyens à part entière, des hommes et des femmes qui payent leurs impôts.

Bref, notre performance « Medecine de première ligne » n’est pas reluisante. D’une part, nous sommes les cancres de la classe. D’autre part, ce qui est beaucoup plus grave, nous y sommes depuis fort longtemps. 

Pourquoi alors, n’entendons-nous pas le tintamarre des casseroles?  

Pourquoi personne ne se plaint, sauf assez discrètement et occasionnellement? Pour obtenir une réponse, il faut chercher du côté d’un économiste socialiste : Albert Hirschman. Ce dernier a élaboré une théorie devenue célèbre sur les comportements quotidiens des consommateurs en situation de mécontentement. Essentiellement, ceux-ci oscillent entre « Prise de parole » et « Défection ». 

Dans le cas qui nous occupe, si peu de personnes se plaignent, serions-nous alors dans un cas de « Défection »? Impossible, la maladie ne prend jamais congé. Alors quoi? 

Une hypothèse : la médecine à 2 vitesses n’existe pas 

Précisément, elle n’existe pas dans la MRC Pierre-de-Saurel, lieu géographique enclavée aux allures et à la mentalité de village gaulois retranché. Ce qui semble exister, c’est une médecine à 5 vitesses. Eh oui, si personne ne se plaint de notre médecine de première ligne tiers-mondiste, c’est que les citoyens ont développé des alternatives. 

Vitesse « 1 » : Tous les gens directement impliqués dans le système de santé qui se soignent entre eux par échange de services. Verrait-on une infirmière quitter inopinément son service pour venir attendre de longues heures à l’urgence avec son enfant? 

Vitesse « 2 » : Tous les gens qui ont des contacts dans le système de santé et qui en profitent pour avoir un rendez-vous ou un privilège quelconque. SVP, ne soyons pas hypocrites. 

Vitesse « 3 » : Tous les gens qui ont suffisamment d’argent pour ignorer le système public. 

Vitesse « 4 » : Tous les gens qui comme moi, ont la chance d’avoir un médecin de famille. Le problème, c’est qu’il n’est jamais disponible à moins de l’avoir prévu 6 mois à l’avance, dans un Québec supposément en surplus de médecins

Vitesse « 5 » : Les autres, soit 40% de nos concitoyens c.-à-d. 20 000 personnes. Qu’ont-ils fait de spécial pour mériter un tel traitement de citoyen de seconde zone

Si ça existait, on l’aurait 

Pas besoin de faire un sondage coûteux pour identifier des pistes d’amélioration en matière d’accès aux services de première ligne. Ce qui précède est suffisant.  

De même, de tout temps, les employés travaillent TOUJOURS dans le système que la gestion (les « boss ») détermine? Donc, arrêtons de chercher des coupables et des défaites auprès des syndicats, des coupures de 4,6 M$, du vieillissement ou je ne sais quoi. Adaptons-nous et innovons. 

D’où l’heure des responsabilités, des objectifs et du rendre compte 

Il est temps que ça change. Dans ce domaine comme d’autres, la MRC Pierre-de-Saurel doit viser l’excellence. À résultats médiocres, il faut donner des objectifs ambitieux aux responsables. 

Qui sont-ils, ceux qui ont les mains sur les manettes? Madame Martine Bouchard, nouvelle directrice générale du CSSSPS avec un contrat de 4 ans, monsieur André Lussier, de nouveau président du conseil d’administration du CSSSPS et madame Élaine Zakaib, nouvelle députée (et ministre) du comté de Richelieu. 

Quels objectifs leur fixer?  

Le 31 décembre 2016, la performance du CSSSPS devra se situer au minimum, au-dessus de la moyenne québécoise pour l’ensemble des activités liées à la médecine de première ligne. 

La confiance n’exclut pas le contrôle. 

Les nouveaux responsables du CSSSPS doivent avoir l’obligation formelle au 31 décembre de chaque année, de rendre compte à la population concrètement et simplement, de leur performance, chiffre à l’appui.  

Le tout devrait commencer immédiatement avec la publication par le CSSSPS, d’un état de la situation. Il n’y rien de mieux que se mesurer au départ et à l’arrivée. Parce que hors de la mesure, point de salut. C’est le prix de la confiance. 

Quoi? Le CSSSPS a déjà publié son rapport annuel, 2011-2012. Voyons voir. 

Ce volumineux rapport (70 pages) ne donne aucune indication en regard de l’état de la performance ci-haut mentionné. D’ailleurs, le mot « famille » y apparaît seulement deux fois, l’expression « médecins de famille » est presque ignorée avec une seule mention et « Patient » a droit à 6 mentions. 

Le mot « gestion » y figure plus de 50 fois et « comité », plus de 130 fois.  

Groupe de médecine familial? Inconnu.  

D’après vous, y a-t-il des priorités à revoir? 

De là, une suggestion en guise de conclusion 

Si vous n’avez pas de médecin de famille ou si vous êtes insatisfaits des services offerts en médecine de première ligne, portez un carré en tissu blanc "infirmière".  

 

Jocelyn Daneau
jocelyndaneau@gmail.com

* Le Rapport annuel 2011-2012 du CSSSPS indique à l’état des résultats, une dépense d’exploitation totale pour l’exercice terminé le 31 mars 2012, de 114 749 240$. Ce montant est utilisé comme référence pour le budget 2013-2014 à la place du montant de 107 M$ rapporté dans les 2 Rives du 8 mai 2012.   

** Durée moyenne du séjour : C’est le nombre d’heures que le patient passe sur une civière aux urgences avant d’obtenir son congé ou d’être hospitalisé dans une chambre ou d’être dirigé ailleurs. Classe des hôpitaux territoriaux de moins de 10 000 civières.  

Il semble que ce résultat ne tient pas compte des gens qui quittent l’urgence, excédés par les délais d’attente.

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