Poursuite de 22
M$ - SDD / Conporec : « 100
jours » pour en finir
Normalement,
l’individu (et l’équipe) qui
prend de nouvelles fonctions
dispose d’une période de grâce,
les fameux « 100 jours ».
Au Québec, les années d’élection
municipale, les élus ne
disposent pas de ce délai en
matière budgétaire. Déjà, ils
sont plongés dans la préparation
du budget 2014, avec les
contraintes que ce genre
d’exercice impose, notamment la
multitude de promesses
électorales encore fraîches à la
mémoire des électeurs (et des
chroniqueurs).
Ceci étant, en
campagne électorale et sans
qu’on ne lui demande,
probablement inspiré par un
intempestif besoin électoraliste
et voulant faire preuve de
leadership, Serge Péloquin s’est
engagé à régler rapidement le
dossier de la poursuite de 22 M$
de SDD/Conporec contre la ville
de Sorel-Tracy et la MRC
Pierre-de-Saurel (ST/MRC
ci-après). « 100 jours »,
c’est ce que j’ai retenu.
Mais je ne sais pas s’il s’agit
de (re)lancer une tentative de
règlement hors cour*, 100 jours
après le 3 novembre 2013; ou si
Serge Péloquin compte obtenir un
règlement avant le 3 février
2014. Dans le premier cas,
c’était une promesse inutile.
Dans le second, elle était
ambitieuse, voire téméraire.
Globalement, nous
devons comprendre que Serge
Péloquin s’est engagé à trouver
RAPIDEMENT un règlement
hors cour avec SDD/Conporec,
pour que nous puissions en finir
avec cette poursuite.
La poursuite de
22 M$
Titre du document
déposé en cour Supérieur le 6
juillet 2011 : « Requête
introductive d’instance pour
jugement déclaratoire et pour
l’octroi d’une indemnité pour
expropriation déguisée »
(Référence : 415679-1, texte
intégral, cliquez sur
22M$). C’est uniquement
sur cet aspect que la cause
porte, notamment la seconde
partie.
Comme non-avocat,
je comprends du document que la
prétention de SDD/Conporec est à
l’effet que ST/MRC a favorisé la
relance de ses installations
situées au 3125 rue
Joseph-Simard, comme seul
partenaire dans l’activité de
tricompostage pour la région de
la MRC Pierre-de-Saurel. À un
moment donné, ST/MRC s’est
retiré de la démarche, coupant
tout lien et laissant SDD/Conporec
avec des installations devenues
sans valeur. Ce faisant, SDD/Conporec
considère que ST/MRC a pratiqué
une expropriation déguisée pour
faire baisser la valeur de ses
installations. SDD/Conporec
réclame donc 21 850 000$
(juillet 2011) comme coût estimé
pour la relocalisation de ses
installations.
Les enjeux
Pour SDD/Conporec,
l’enjeu est essentiellement
financier. Cette réclamation
s’appuie sur un ensemble de
documents, échangés avec ST/MRC
dans le cours d’une activité de
démarchage normale. Point
majeur : aucune lettre
d’intention (« memorendum
of understanding – MoU »)
n’a été convenue entre les
parties pour encadrer les
discussions précontractuelles.
Il va de soi qu’aucun contrat
n’a été signé.
Pour Sorel-Tracy
et la MRC Pierre-de-Saurel (ST/MRC),
outre l’aspect financier,
l’enjeu se situe au niveau de sa
réputation (et de la parole
donnée) comme terre d’accueil
pour les investisseurs.
D’ailleurs, Serge Péloquin se
montre conscient de cet enjeu
(cliquez sur « 100
jours »).
Se peinturer (un
peu, beaucoup) dans le coin
On ne reviendra
pas sur l’ensemble des erreurs
d’exécution des anciens élus
ayant mené à cette poursuite de
SDD/Conporec. Nier qu’il y a eu
des erreurs, c’est comme nier
cette poursuite, peu importe sa
robustesse.
Stratégiquement,
la promesse des « 100 jours »
de Serge Péloquin n’était pas
réellement nécessaire dans
l’état de la campagne électorale
le 31 octobre 2013, 3 jours
avant le vote. Ce faisant,
celle-ci induit au minimum 3
erreurs tactiques, qu’il
convient de rapporter comme
éléments contextuels, pouvant
influencer les résultats de la
négociation à venir.
Premièrement, au
31 octobre 2013 en principe,
Serge Péloquin ne devait détenir
qu’une connaissance citoyenne du
dossier, idem à celle de votre
humble chroniqueur. Il n’avait
donc aucunement accès aux
conseils des avocats au dossier
ou à toutes autres informations
privilégiées, avant de promettre
dans les circonstances, ce « 100
jours » inopiné.
Deuxièmement,
Serge Péloquin n’avait aucun
mandat (et les balises
correspondantes) de son éventuel
conseil municipal, pour
entreprendre des négociations
hors cours. On sait en politique
municipale, qu’une grande partie
du pouvoir d’un maire provient
des conseillers municipaux. En
ce sens, Serge Péloquin a promis
les « 100 jours » sur la
base d’un conseil municipal qui
n’existait pas. Une promesse
hasardeuse, surtout que 5 des
actuels conseillers sont issus
de l’administration Dauplaise.
Troisièmement,
erreur majeure, Serge Péloquin
se prive d’un levier important
dans le cadre d’une
négociation : le temps.
Contraint par le temps de livrer
un résultat, il permet à SDD/Conporec
d’attendre une offre
intéressante. Si ST/MRC (Serge
Péloquin) dépasse le « 100
jours », alors il ne
respecte pas sa promesse
électorale. S’il conclut avant
les « 100 jours », il
pourrait être soupçonné d’avoir
obtenu une entente à rabais.
Dans ce dernier cas, Serge
Péloquin ne doit jamais perdre
de vue qu’il est le maire de
tous les citoyens de
Sorel-Tracy. Il n’est pas le
représentant de quelques groupes
de pression qui gravitent autour
de ce dossier.
Dans tous les
cas, avec cette promesse peu
pertinente sur les « 100
jours », Serge Péloquin pourrait
être amené à marcher sur la
peinture.
Les scénarios de
règlement
Si ST/MRC décide
que la réputation de la ville de
Sorel-Tracy et de la région est
primordiale, alors il faut
acheter la paix et mettre un
terme à cette poursuite, en
négociant un « deal ».
Dans l’hypothèse
où aucun règlement hors cour
n’est possible ou que ST/MRC
conclut que SDD/Conporec n’a pas
de cause parce qu’effectivement,
il n’y a aucune lettre
d’intention préalable ou de
contrat, c’est le procès devant
juge avec tous les frais et
risques afférents pour les
parties.
Dans cette
hypothèse, le juge devra
interpréter l’état du droit et
la jurisprudence en fonction de
la nature du risque de
l’entrepreneur, en l’occurrence
SDD/Conporec. Autrement dit,
est-ce que SDD/Conporec dans le
développement normal de ses
affaires, a interprété (trop) en
sa faveur, les paroles et les
gestes (documents légaux et
administratifs, lettres,
courriels, etc.) de ST/MRC.
Alternativement, dans quelle
mesure ST/MRC a-t-il induit en
erreur SDD/Conporec,
consciemment ou non. En ce sens,
où tracer la frontière entre
stratégie de négociation et
mauvaise foi? Finalement,
comment déterminer s’il y avait
réelle intention (planifiée) de
la part de ST/MRC de favoriser
une « expropriation
déguisée »?
Vers le 3 février
2014
Considérant qu’il
n’y a pas de lettre d’intention
ni de contrat entre les parties.
Considérant le passage du temps,
le changement d’administration
municipale et de maire à
Sorel-Tracy, j’offrirais à SDD/Conporec
un règlement hors cour en deux
volets :
1)
Un montant
pour préserver notre réputation
comme milieu accueillant pour
les investisseurs, lequel
inclura l’achat du terrain du
3125 Joseph-Simard.
2)
La création
d’une coentreprise dont
l’objectif serait le
démantèlement ou la reconversion
des installations sises au 3125
Joseph-Simard.
Jocelyn Daneau
Courriel :
jocelyndaneau@gmail.com
Blogue -
Sorel-Tracy dans l’univers :
http://wp.me/2JVSB
*
Selon mon logiciel de correction
Antidote 8, « règlement
hors cour » est un
anglicisme. Il faudrait utiliser
« entente à l’amiable ».
De même, les « frais légaux »
sont des « frais de justice »
en français.
Voir aussi :
Négocier quoi avec SDD Conporec
?, André Mandeville, 2
novembre 2013.
Suggestion de lecture (en
anglais) :
Tips from a master negotiator,
Procurement
Leaders, 18 novembre 2013. |