Éole et le Parc
éolien Pierre-de-Saurel : des
questions et une obligation
morale
Ce que j’aime à
Sorel-Tracy, outre le fait
d’habiter ma terre natale après
plus de 25 ans d’absence, c’est
qu’il y a peu ou pas de vent.
J’ai habité Varennes pendant 21
ans, là il vente. Avant notre
retour à Sorel-Tracy, nous avons
fait un détour par Mont
St-Hilaire. Là, c’est connu, il
vente en c…, attaché vos
tuques.
Ceci étant, en
matière de vent, on ne peut pas
dire que la région de
Sorel-Tracy soit une contrée
venteuse, du moins au ras des
pâquerettes. C’est pourquoi j’ai
lu, en amateur et profane, le
Résumé technique – Analyse
énergétique du parc éolien
Pierre-de-Saurel (11
décembre 2013). Celui-ci avait
comme objectif de « … fournir
une analyse indépendante de la
ressource éolienne ainsi que de
la production énergétique sur le
projet éolien proposé. »
Disons les choses
simplement, j’ai toujours été
favorable comme citoyen à ce
projet. Mais cela ne m’a jamais
empêché de me questionner sur
certains aspects de celui-ci,
dans le silence. Pourquoi?
Essentiellement je le rappelle,
je suis un employé permanent
d’Hydro-Québec depuis des
lustres. Je suis donc tenu à une
certaine réserve par un
Code de conduite quant aux
affaires de mon employeur. J’ai
toujours respecté
scrupuleusement ce Code de
conduite et je continue de
le faire.
Ceci étant, ce « résumé
technique » porte uniquement
sur la variable « vent »
du projet et Hydro-Québec n’est
pas concerné comme entreprise.
Mais moi à titre de citoyen de
Sorel-Tracy, je me sens
concerné. C’est pourquoi, je
prends la liberté d’intervenir
publiquement, parce les vents
dans ce projet d’installation
d’éoliennes de 66 millions de
dollars, sont équivalent
à ses revenus.
Ainsi, les
entrées d’argent et donc, la
rentabilité du projet seront en
fonction de la force et de la
régularité des vents. Si ceux-ci
sont aléatoires de par
leur nature, l’investissement de
66 M$ lui, selon sa structure
financière, est avec
certitude sous notre
responsabilité de contribuables.
Notamment pour nous, les
citoyens de Sorel-Tracy qui
représentent 68 % de la
population de la MRC Pierre-de-Saurel
c.-à-d. 44,9 M$ des 66 M$
(1 283$ par citoyens pour 35 000
habitants).
Dans ce contexte,
la Société en commandite Parc
éolien Pierre-de Saurel a
publié un communiqué intitulé (9
février 2014) :
Des nouvelles données de vent
confirment la rentabilité du
projet y
incluant, le « résumé
technique » ci-haut
mentionné. J’ai des réserves sur
l’interprétation que l’on donne
des résultats, en regard de la
rentabilité du projet.
1)
De
septembre 2009 à août 2013 (47
mois), la moyenne des vents
mesurée a été de 5,6
mètres par seconde (m/s) à 60
mètres de haut. D’avril à août
2013 (5 mois, printemps/été), la
moyenne estimée a
été de 6,4 m/s à 100 mètres. Un
écart de
14,3 %
surprenant a priori, sans
que l’on sache s’il est normal
ou non.
De
plus, avec ces deux mesures,
compare-t-on des comparables?
Les hauteurs, les durées, la
période, les méthodes et les
instruments de mesure ne sont
pas similaires (voir : test de
Gage R & R).
Quand serait-il d’une
vraie mesure avec un mât de 100
mètres, comme le recommande
l’expert au dossier, GL Garrad
Hassan Canada, inc. ? Mystère.
2)
Le 6,4 m/s
annoncé comme garantissant la
rentabilité du projet n’est pas
présenté avec son écart-type
c.-à-d. sa variation. C’est
comme des Fettucines
sans Alfredo, ça ne goûte rien.
On sait en statistique qu’une
moyenne sans son écart-type ne
signifie rien. Donc, ce 6,4 m/s
en lui-même est en fait sans
signification.
3)
Si nous
voulons lui trouver une
signification, il faut aller au
dernier paragraphe de la
dernière page de ce rapport et
celui-ci laisse pantois : « La
prévision nette d'énergie P50
présentée ci-dessus représente
la moyenne à long terme, d’une
probabilité de dépassement de
50 %, pour la production
d'énergie annuelle du parc
éolien. Cette valeur est la
meilleure estimation de la
valeur moyenne à long terme qui
peut être attendue du projet.
Il y a donc une probabilité de
50 % que la production moyenne
d'énergie puisse être
inférieure (ou supérieure)
à la valeur donnée, même
lorsque considérée sur de très
longues périodes. » À
moins d’indication contraire,
cela implique qu’il y a 50 % de
chance que, lorsque que mesurée
à n’importe lequel moment d’un
jour donné, notre 6,4 m\s varie
approximativement entre 3,2 m\s
et 9,6 m\s. Toute chose étant
égale par ailleurs, avec le
14,3 % d’écart mentionné
précédemment, la rentabilité de
ce projet est questionnable. La
moitié du temps, on ne sait pas
si le vent va être au
rendez-vous et donc, les
revenus.
4)
Une
dernière remarque, surprenante,
concernant l’estimation (par
extrapolation) de ce 6,4
m\s. Celle-ci a été effectuée à
partir des données de vent de la
ville de Varennes. J’y ai habité
pendant 21 ans et il y vente pas
mal plus que dans notre région.
Je conviens que cette conclusion
est intuitive et non
scientifique. Cependant,
l’estimation formelle du 6,4 m\s
est basée sur une série de
données calculées à partir de
coefficients de corrélation non
identifiés dans le « résumé
technique ». Où se
situent-ils entre 0 et 100 % et
une fois connue, sur quoi
s’appuient ce ou ces choix? Ces
hypothèses sont fondamentales
dans le calcul de l’estimation
du 6,4 m\s. Bref, région réputée
venteuse et hypothèses mystères
comme base de la rentabilité du
projet, il y a lieu de se
questionner. Donc…
Des questions
En termes de
moyenne sur 20 ans, en mètre par
seconde, y incluant son
intervalle de confiance à 95 %
(donc l’écart-type), pour un mat
à 100 mètres :
1)
Quelle est
la VRAIE vitesse des vents,
c.-à-d. réellement mesurée?
2)
Quel est,
toujours dans la même unité de
mesure, le seuil de rentabilité
nous permettant de générer comme
promis, des profits de plus de
52 M$ sur 20 ans? (Note :
31,9 M$ avec des mâts à 60
mètres et
20 M$ de plus avec des 100
mètres).
Question
complémentaire :
Serait-il envisageable dans
l’état actuel de choses, de
vendre immédiatement une
participation dans ce projet?
Cela permettra de réaliser un
profit immédiat. Surtout, nous
pourrions partager le risque qui
m’apparait intuitivement plus
élevé que le « zéro risque »
et les certitudes béates
véhiculés par certains
promoteurs de ce projet, depuis
le début?
Une obligation
morale
La probabilité
qu’une pièce de monnaie tombe
sur « pile » est de 50 %.
Elle est donc équivalente au « 50 % »
de marge d’erreur annoncée dans
le « résumé technique ».
« Flipperiez-vous » 66
M$ de votre argent personnel
avec un « 25 cents »?
Poser la question, c’est y
répondre.
Je suggère donc
fortement à nos élus, à ceux de
la MRC Pierre-de-Saurel et à la
société en commandite Parc
éolien Pierre-de-Saurel,
dont l’un des membres de son
conseil d’administration est le
maire Sorel-Tracy monsieur Serge
Péloquin, de faire effectuer
un audit économico-financier du
projet par un tiers indépendant.
Ce projet est rendu à un moment
charnière où il devra bientôt
aller en appel de soumissions
pour l’achat des équipements
c.-à-d. des éoliennes. C’est
donc le moment idéal pour
prendre du recul et pour donner
confiance aux citoyens quant à
sa rentabilité financière.
C’est une
question de crédibilité puisque
ce projet sous la responsabilité
en grande partie de non-élus,
n’a jamais fait l’objet d’un
référendum ou l’enjeu d’une
élection, en regard des montants
colossaux en cause, endossés
de facto par les
contribuables. En ce sens, ce
projet souffre depuis son début
d’une légitimité démocratique,
au quelle nous avons
l’opportunité du moins en
partie, de remédier.
Jocelyn Daneau
Courriel :
jocelyndaneau@gmail.com
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