Kid ne
court plus !
Je l’aime bien
«Kid». Il n’a jamais eu la
langue dans sa poche, vous savez
! Moins actif, moins impliqué,
il ne faudrait pas l’oublier.
C’est le danger de traverser le
temps, égarer ceux ou celles qui
ont marqué une époque et notre
région.
Trois générations de
Millette, il est bien fier notre
« Kid » national !
André «Kid» Millette a été un
champion, oui, le titre canadien
à la boxe. C’est une fierté pour
nous. J’ai l’habitude de le
croiser régulièrement. Voilà un
passionné de l’entraînement.
Quand la boxe vous a dicté un
mode de vie, vous êtes marqué
jusqu’à la fin de vos jours.
Par conséquent, après la boxe,
cet ex-policier municipal s’est
mis à courir. Il était bon, très
bon. Parlez-en à ceux qui
pratiquaient ce sport dans
l’temps. «Dans ces années là, on
courait pour être le plus
rapide, le meilleur. On se
surpassait. Même que parfois, on
détestait nos adversaires», vous
dira Raymond Lamoureux, un autre
coq du temps.
Ralenti par le poids des années,
Kid courait lentement. Je le
voyais, je le saluais, je
sentais que je rencontrais un
grand…de nature ! Il y a
quelques jours, je l’ai revu.
Toujours avec son chien, mais un
nouveau, un qui est en mesure de
le suivre. L’autre a peut-être
rendu l’âme, qui sait…
Mais Kid ne court plus. «Je ne
suis plus capable », m-a-t-il
confié difficilement. Je l’ai
senti perdu dans ses pensées
lorsqu’il m’a lancé cette
phrase. Puis, il s’est ressaisi,
tel un champion dans le ring qui
vient d’encaisser un crochet de
la gauche et qui a été ébranlé.
«Je marche, que veux-tu, je dois
m’adapter», a-t-il enchaîné. Il
m’a demandé si j’avais terminé
mon horaire de marathons pour
cette année. Je lui ai confié
qu’après huit, il fallait un peu
de repos, que je prenais
l’entraînement à la
légère…jusqu’au prochain 42km.
Il m’a félicité. J’ai figé.
Pourquoi ? Je n’ai rien de
comparable à ce qu’il obtenait
comme résultats, souvent sous
les trois heures ! J’ai accompli
cette prouesse uniquement dans
mes rêves les plus profonds.
Alors….
«Tu es bon de courir avec cette
mentalité de rechercher le
plaisir, de courir sans penser
au temps, de savourer
l’expérience à fond». Je me
disais, il parle comme un grand
sage, comme un gars qui a déjà
vu neiger, qui sait ce dont il
traite.
Inconfortable, je me suis dit
finalement que je me devais
d’accepter avec plaisir ce
commentaire. Puis, je l’ai salué
et je lui ai souhaité une belle
journée. Je l’ai vu disparaître
tranquillement avec son chien.
Il semblait heureux. Il devait
réfléchir.
Sur le chemin du retour, moi
aussi j’ai pensé. Je me suis dit
que des moments semblables sont
savoureux, unique, sans
brouhaha, dans la plus grande
simplicité. Les rencontres
provoquées par le hasard sont
parfois les meilleures. J’étais
content car je le connais « Kid
» et je sais ce qu’il
représente.
Daniel Lequin
danielmedaille@hotmail.com
|