Pris au
dépourvu au marathon de Boston !
Ouf !
J’ai encore appris. Leçon
d’humilité.
Je dois vous avouer que malgré
toute l’expérience acquise au
fil des années en course à pied,
j’ai été pris au dépourvu.
Jamais je n’avais été confronté
à la fois à des éléments
climatiques tels le froid, un
vent de face du début jusqu’à la
fin et de la pluie, lors de la
119e édition du marathon de
Boston, lundi dernier.
Hanté dès les premiers pas par
la peur de souffrir
d’hypothermie, je n’ai jamais pu
vraiment entrer dans ma bulle.
Quelques minutes avant le signal
du départ, la pluie s’est
abattue pour nous poursuivre
jusqu’au terme de l’épreuve,
prenant quelques pauses
discrètes, question de nous
permettre de refaire le plein de
chaleur.
Conditions exécrables, qui à ma
grande stupéfaction, n’ont pas
empêché les spectateurs de nous
encourager avec vigueur, tels
des héros, nous permettant ainsi
de vivre l’ivresse de cet
événement unique au monde. Je
n’en revenais pas.
J’aurais tellement voulu
exprimer ma gratitude, mon
admiration mais j’étais gelé,
parfois les doigts engourdis,
que j’ai préféré conserver mon
énergie afin d’éviter la
catastrophe que j’appréhendais
tout au long du parcours.
Au 30e kilomètre, transi, je me
suis appuyé la tête sur le mur
intérieur d’une toilette en me
demandant si j’allais être en
mesure de franchir la ligne
d’arrivée !
Sans contredit ma pire
expérience en 58 marathons. Moi
qui imaginais avoir traversé le
pire avec la chaleur du marathon
de Québec et les montagnes de
Waitsfield ! Cet état de
souffrance et de stress ne m’a
pas empêché de constater le
courage de personnes beaucoup
plus éprouvées.
Que dire d’un couple unijambiste
que j’ai croisé avec 5km à
faire, de voir la jeune fille
pleurer alors que son compagnon
tentait de la soutenir afin
qu’elle retrouve l’énergie pour
terminer. Je devais apprendre en
soirée à la télévision de Boston
qu’il s’agissait de Rebekah
Grégory, celle dont je vous
avais parlé il y a quelques
semaines, victime de l’attentat
à la bombe de 2013, accompagnée
de son coach, qui a finalement
pu réaliser son rêve. Quel
courage !
Que dire de Maickel Melamed, un
vénézuélien souffrant de
dystrophie musculaire,
accompagné de guides, qui a pris
20 heures pour franchir la
distance et qui est arrivé à
5h00 au petit matin, sous une
pluie torrentielle et sous les
yeux des caméras de la
télévision. Quel courage !
Sans oublier tous les bénévoles
aux points de ravitaillement qui
encourageaient sans retenu, avec
le sourire. Impressionnant.
Des participants endossaient des
chandails avec le nom de Martin
Richard et le numéro 8. Intrigué
et croyant peut-être qu’ils
couraient pour honorer un adepte
du Québec, je me suis approché
d’une participante aux alentours
du 20e km pour lui demander en
français qui était Martin
Richard. Surprise, elle m’a
regardé avec un air
interrogatif. Je n’ai pas
insisté. J’ai compris que je
détenais la moitié de la réponse
en regardant le bulletin de
nouvelles. Martin Richard, un
jeune américain âgé de 8 ans,
est décédé lors des attentats de
2013.
Rassurez-vous, aucun coup de
chaleur n’a tété recensé mais on
a dû soigner de nombreux cas
d’hypothermie. Croyez-le ou non,
j’y ai vu deux coureurs qui ont
franchi toute la distance torse
nu. C’est à n’y rien comprendre
!
J’anticipais vivre ma 3e
participation en prenant le
temps de la vibrer. J’ai dû
modifier mon attitude. Imaginez,
je n’ai même pas arrêté au
collège Wesley pour faire
l’accolade à une étudiante, ne
respectant pas ainsi une vieille
tradition !
Marathon à oublier ? Non, car
dans la vie, il faut apprendre à
composer avec l’inconnu et
s’ajuster. Les expériences ne
sont pas toujours agréables à
traverser mais elles nous
permettent de comprendre,
d’apprécier la chance dont nous
disposons pour franchir les
missions que nous voulons bien
nous accorder.
De retour à l’hôtel, je n’ai pas
perdu de temps pour me retrouver
sous une douche chaude, certes
la plus longue de ma vie.
Preuve que surmonter des
embûches nous emmènent à
savourer la simplicité effacée
par l’habitude et la gratitude
fournies par la routine de la
vie. Quand on doit survivre, la
perception diffère.
Statistiques
Temps : 4h15 :27
Classement général : 19562 sur
26610
Classement catégorie d’âge : 621
sur 899
Daniel Lequin
danielmedaille@hotmail.com
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