Étouffé
par l’émotion !
J’écris de ma
chambre d’hôtel. Je suis encore
sous le choc, deux heures après
mon marathon.
Le conducteur de la navette qui
nous ramenait de l’aéroport au
centre-ville a déposé un CD dans
son lecteur. Une chanson d’Elvis
pour nous accueillir. Heureux
comme un prince, il chantait et
gesticulait, imitant un pianiste
sur son tableau de bord.
Bienvenue à Memphis, Tennessee !
Il nous a raconté sa vie, son
travail à Graceland, son divorce
et nous a parlé d’un homme, une
histoire que je n’ai pu saisir
correctement.
Suite à la cueillette du
dossard, il fallait bien manger
des pâtes. L’organisation
offrait le souper. Sans billet,
notre quatuor s’est présenté à
l’entrée. Une femme ne cessait
de nous répéter : Sold Out !
Sold out ! Pendant ce temps, un
autre bénévole regardait la
scène. Il a vite fait de
remarquer que nous n’arrivions
pas de la région et encore moins
des États-Unis. Je lui ai
confirmé que nous venions de
Montréal.
«
Attendez un peu, je vais vous
arranger ça ! ».
Quelques minutes plus tard, nous
rentions dans une salle
gigantesque, au rythme d’une
forte musique Pop et des
cheerleaders qui s’époumonaient
à notre endroit…. Wow ! Quelle
incursion.
Après le copieux repas, des
dirigeants de l’hôpital ont pris
la parole, des discours émotifs,
mettant en évidence des gens qui
ont vaincu une ou deux fois le
cancer et qui s’apprêtaient à
courir le lendemain.
Or, le clou de la soirée
appartient à cette mère qui a
perdu sa fille Élizabeth suite à
un dur combat contre le cancer
et qui participait au marathon
en son honneur. « Vous êtes tous
des héros. Je vous admire. Ce
qu’elle a pu traverser, je pense
sincèrement que c’est pire qu’un
marathon ». Une vation debout
instantanée de la part des
convives devait suivre.
Au même moment, mon ami Pierre
Bouchard m’a regardé, l’air
déconfis. Je le sentais secoué.
« On
s’en va, je n’en peux plus,
c’est trop lourd. »
Il faut comprendre que les
profits amassés par cet
événement reviennent
essentiellement au St.Jude
Children’s Research Hospital de
Memphis, qui soigne les enfants
victimes du cancer en provenance
de partout aux États-Unis. Un
baume dans un état qui a voté
pour Donald Trump !
Le point culminant de ce 42km
fut sans contredit notre passage
à travers le gigantesque terrain
de l’hôpital. J’ai dû arrêter,
ébranlé par la vue des jeunes
malades, présents le long du
parcours, accompagnés de leurs
parents. Étreint par l’émotion,
je n’arrivais plus à respirer,
près de l’étouffement.
J’ai dû prendre une pause pour
me ressaisir, ce qui m’a permis
d’embrasser une jeune fille (10
ans) en chaise roulante. Sa mère
avait réussi un exploit, lui
faire une petite couette sur le
dessus de sa tête avec une
dizaine de cheveux ! Ouf ! Je
vous le raconte et je ressens
encore des frissons.
J’ai vraiment trouvé ce passage
difficile et combien éprouvant.
Une leçon de vie qui vous remet
les pendules à l’heure.
D’un bout à l’autre du marathon,
les spectateurs nous
remerciaient pour notre
participation. À leurs yeux,
nous étions des héros.
Animé, motivant, revalorisant,
ce marathon se veut exceptionnel
et peut difficilement se
comparer à d’autres considérant
la cause. La conclusion se
déroule dans un stade de
baseball dont l’équipe de la
ligue Américaine est affiliée
aux Cards de Saint-Louis. Et
avec tout un lunch par surcroît
à la fin.
En soirée, un match de la NBA
avec une victoire de 103 à 100
des Grizzlies de Memphis face
aux Lakers de Los Angeles et une
intéressante visite à Graceland
le lendemain matin ont complété
ce week-end unique qui aura
marqué les membres de notre
groupe.
Imaginez deux secondes s’il
fallait que l’hôpital
Sainte-Justine de Montréal
organise son propre marathon !
Les coureurs du Québec et
d’ailleurs sauteraient sur
l’occasion car si cela
fonctionne à Memphis….
Une 15e édition, une
participation record de 23,000
coureurs, plus de 10 millions $
de profits pour une organisation
qui avait regroupé 2500 inscrits
à sa première année.
Je vous le dis, cette course ne
cessera de grandir. Je vous la
recommande. Personnellement, ce
fut l’un des marathons les plus
émotifs de ma carrière et l’un
des mieux organisés.
Je suis assurément un coureur de
marathon mais j’ai constaté qu’à
Memphis, je suis un héros !
Résultats de mon 72e
marathon
Temps : 4h06 :08
Classement général : 622 sur
2474
Classement catégorie d’âge : 5e
sur 33
Daniel Lequin
danielmedaille@hotmail.com
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