Steve
Charbonneau plaqué par un
marathon !
Sur le chemin
du retour suite à son marathon à
Ottawa, c’est Isabelle (Charest)
qui a conduit l’automobile. « Je
me sentais exactement comme
après un match de football chez
les Alouettes, la même
sensation. Lorsque nous sommes
arrêtés au resto à Vaudreuil, tu
aurais dû me voir quand je me
suis déplié ! J’ai dit, c’est
terminé. »
Ce n’est pas une plaisanterie,
ses bras sont plus gros que mes
cuisses ! J’ai l’air d’un nain à
ses côtés. Steve Charbonneau est
un gaillard. Je ne voyais plus
ma main lorsqu’il m’a serré la
pince pour m’accueillir dans ses
quartiers de la Fondation des
sports adaptés au Lac Brome.
Soleil radieux, il s’affairait
en plein déménagement.
Heureusement, les anciens
bureaux de la fondation se
situent juste de l’autre côté de
la rue. « Nous n’aurons pas
besoin d’un camion ». Je le
crois, juste sa paire de bras
fera le boulot !
Au grand jamais je n’aurais
imaginé qu’un jour, je
m’entretiendrais avec Steve pour
parler d’un marathon. À 6’5, 260
lb, on s’accorde pour dire qu’il
est loin du physique d’un Kenyan
!
« Moi aussi, ça m’a surpris et
même si ça semble incroyable, ce
ne fut pas si pire. C’est
stratégique mon affaire. Je suis
gémeau. Il me faut des défis
dans la vie sinon, je n’avance
pas. » Le pire dans toute cette
aventure, c’est qu’il n’a même
pas pu courir une seule fois
durant les cinq semaines
précédentes du marathon.
À
Noël dernier, il agaçait son
frère Pierre, l’artiste de la
famille. Celui-ci voulait perdre
du poids. « Nous avions convenu
avec mon autre frère que nous
allions participer au demi
d’Ottawa. Mon frère et moi, on a
oublié mais pas Pierre. Quand on
a voulu s’inscrire, le demi
affichait complet. L’autre
alternative qui s’offrait
devenait logiquement le
marathon. Je me suis dit que
pour mes 42 ans (sa fête est le
29 mai), courir 42km s’avérait
un bel objectif ! »
À vrai dire, Steve n’a pas
éprouvé de plaisir. « À -30
Celsius, je ne cours pas. Je
cours quand il fait beau et j’ai
compris que pour avoir du
plaisir à courir un marathon, on
doit s’entraîner. »
Lors des derniers kilomètres, un
malaise au genou droit l’a rendu
inconfortable. « J’essayais de
compenser. Isabelle m’a filmé à
un certain moment et je me suis
vu tout croche. Tu sais, la plus
longue distance que je courais
autrefois c’était 40 verges !
Ottawa a donc gagné sur moi.
J’étais souriant malgré tout….et
je n’ai pas vu une seule tulipe.
Elles sont où les tulipes ? »,
m’a-t-il demandé en riant. Son
temps fut de 5h05.
Or, Steve projette déjà d’en
courir un autre. Je lui ai
suggéré Montréal. Il a regardé
au ciel. « Peut-être. Il est
plat ? » Je lui ai proposé de
l’accompagner. Il va y songer.
Il y a de la vie, de l’espoir.
En sa compagnie, impossible de
ne pas parler de son implication
avec la Fondation des sports
adaptés. Père de deux enfants de
10 et 6 ans et sa femme,
l’ex-patineuse de vitesse
olympienne qui se retrouve
impliquée avec les Jeux de Rio,
Steve doit trouver du temps pour
s’entraîner. Entre la maison et
le bureau, il y a 18km. Oui, il
y songe de courir en allant
travailler.
Depuis le 1er octobre 2014, il
occupe la présidence de cette
fondation. Il a quitté son poste
de directeur des loisirs à
Farnham pour prendre la relève
du fondateur de la fondation qui
éprouvait des ennuis de santé.
On l’a embauché sur le champ.
Des Steve Charbonneau, on n’en
retrouve pas à tous les coins de
rue !
Le potentiel d’aider est énorme.
Toutefois, la fondation doit
financer un budget qui varie
entre 250,000 à 300,000$
uniquement par des dons privés.
Aucune subvention pour s’occuper
des 125 militaires blessés et
plus de 250 personnes
handicapées, les sortir de leur
isolement, leur donner le goût
du dépassement et une dose de
confiance avec des sports tels
le ski alpin et les sports
nautiques.
De plus, Steve et son adjointe
doivent dénicher des bénévoles.
On en retrouve 160 présentement.
« Les gens qui décident de
s’impliquer réalisent que leur
apport est gratifiant.
Régulièrement, je dois les
ralentir car je ne veux pas
qu’ils se brûlent. Je veux
qu’ils reviennent pour les
futures années. » Un bénévole,
c’est précieux.
Toutes les activités se
déroulent dehors car Steve est
un gars de plein air. « Je suis
le même gars qui va mettre de
l’essence dans le bateau que
celui qui ira solliciter de
l’argent. Je peux souder,
travailler le bois, je suis
habile de mes mains. J’ai même
créé le logo de notre fondation
! »
Steve estime qu’il accorde en
moyenne 50 heures par semaine à
cette responsabilité. L’été, on
parle de sept jours sur sept. Il
s’était donné deux ans pour
combler un budget de 300,000$.
Malgré ses efforts, il n’y est
pas encore arrivé.
Il admet que parfois, à force de
porter plusieurs chapeaux, la
pression devient énorme. « Les
intervenants politiques
devraient comprendre que lorsque
nous obtenons la joie de vivre
chez un handicapé, c’est tout
son entourage qui en profite.
Alors, je dis souvent aux gens
que s’ils veulent nous aider,
ils peuvent poser deux gestes.
Soit nous faire un chèque ou
nous donner du temps. Assez
simple n’est-ce pas ? »
Les témoignages de la part des
handicapés à la suite de leur
expérience avec la fondation
affluent de plus en plus. Il
n’est pas rare de lire ou
d’entendre qu’ils ont traversé
le plus bel été de leur vie ou
de belles sensations en ski
alpin l’hiver. Les sortir de
leur zone de confort dans un
climat de sécurité et bien
entouré, voilà la mission de
Steve. « Je veux que les gens
trouvent ça cool de venir faire
du sport avec nous. »
Heureusement, la région du Lac
Brome regorge de personnes bien
nanties qui apportent leur
contribution. On a déjà vu une
personne payer à elle seule une
embarcation nautique évaluée à
80,000$ pour la cause !
Un autre ex-joueur des Alouettes
siège sur le conseil
d’administration. Il s’agit de
Keith Eaman. « Je suis avec la
fondation pour y rester. Quand
tu as connu la célébrité, tu
cherches souvent une opportunité
pour faire la différence. Je
l’ai trouvée !», m’a expliqué
Steve.
Étienne Boulay a publié
récemment qu’il allait courir
son premier marathon à Montréal
en septembre prochain. Si jamais
Steve décide de s’inscrire, ils
pourraient former le premier duo
de l’histoire de cette équipe à
participer à un marathon et par
surcroît, Étienne pourrait
profiter des conseils de son
coéquipier.
Une histoire à suivre !
Daniel Lequin
danielmedaille@hotmail.com
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