Alléluia !
Il m’a dit : Je dois aller voir
quelqu’un ».
Il se dirigea vers l’église
situé tout juste derrière notre
hôtel. Disons qu’en matinée, les
visiteurs ne se pressent pas
pour les visites. Il s’est
avancé et à quelques pas de
l’autel, il s’est soudainement
arrêté.
À ma grande surprise, il s’est
mis à chanter à cappella,
l’alléluia.
J’en avais la chair de poule.

Sa voix rauque résonnait dans
l’enceinte. Je l’aurais écouté
encore pendant des heures.
Par la suite, il a pris la
direction d’un présentoir de
cierges. Derrière, trônait une
statue du Frère André. Voilà
celui qu’il était venu
rencontrer. Nous avons allumé
chacun notre cierge et Mario a
récité une prière à haute voix
qui visait à nous protéger pour
notre marathon que nous allions
courir le lendemain matin à
Québec.
J’ai vu le vrai visage de cet
artiste, un homme profondément
humain, le cœur sur la main,
toujours prêt à aider.
« Tu
sais, jeune garçon, il
m’arrivait régulièrement de
chanter dans les églises. »
J’allais vivre une expérience
particulière à ses côtés. Quand
même, ce n’est pas tous les
jours que l’on peut courir avec
Gerry Boulet !
Spécial, n’est-ce pas ?
Il n’avait pas le choix. Plus
rapide, il devait ralentir sa
cadence afin de se joindre à mes
côtés et cet aspect ne lui
causait aucun problème, on s’en
doute bien.
Tant avant le départ que durant
notre 42km, les coureurs et les
spectateurs le reconnaissaient
et à chaque fois, il se faisait
un devoir de collaborer. On
sentait qu’il s’impliquait avec
soin et beaucoup d’intérêt,
certes par souci de
professionnalisme.
Il devait se procurer de
nouveaux souliers après qu’il se
soit aperçu tardivement que les
siens montraient de sérieuses
perforations. Trop tard car il
ne pouvait se les procurer à
temps pour qu’il puisse les
enfiler convenablement. Par
conséquent, à partir du 30e
kilomètre, une chaleur
inconfortable est apparue sous
ses pieds. On comprend !
Sans se plaindre, il ne
paraissait même pas incommodé.
Tout se déroulait parfaitement
bien jusqu’au moment où j’ai
remarqué un ralentissement de sa
part sur le boulevard Champlain.
Avec environ 8 km à parcourir,
Mario titubait quelque peu.
Puis, j’ai entendu clairement :
« F…ck ! » Il éprouvait du mal à
la bandelette de sa jambe
gauche. « Je pense que tu devras
terminer seul Daniel ».
Quoi ?
« Pas
question, je ne t’abandonnerai
jamais. Nous terminerons
ensemble », lui ai-je
aussitôt répondu.

À ce moment précis, j’ai
remarqué sa détermination.
Malgré la douleur, il persistait
tout en prenant soin de saluer
les gens qui le saluaient.
Tellement beau à voir !
Je me sentais fier de le suivre,
une personne tellement
chaleureuse sur toute la ligne.
Lors des cinq derniers kilos,
mon monteur surchauffait, une
sorte de tradition dans mon cas.
À mon tour de ralentir. Les
encouragements de Mario n’ont
jamais cessé. Je ne pouvais
l’abandonner, le décevoir. Il ne
m’a jamais lâché. Dans le jargon
de la course à pied, il m’a tiré
jusqu’au fil d’arrivée. Un vrai
coureur gentlemen.
Il vivait son 3e marathon et
disons qu’à partir du moment où
il a décidé qu’il se
présenterait à mes côtés, ça ne
lui laissait pas une grande
marge de manœuvre pour se
préparer.
Mario n’a peur de rien. C’est un
battant. Il sera présent jusqu’à
mon 100e marathon, je l’espère.
Son idée, car il souhaite faire
un documentaire où une série
télévisée dans le but d’inciter
les gens à courir, peu importe
leurs caractéristiques. Un
caméraman nous a d’ailleurs
talonnés avant, pendant et après
le marathon.
Il est sérieux car il n’a pas la
réputation de parler au travers
son chapeau.
À mes yeux, il s’agit d’un
cadeau tombé du ciel que cette
rencontre avec
l’acteur-chanteur. Je n’aurais
jamais pu imaginer pareil
scénario. Sa contribution, son
apport, sa collaboration ont
déjà dépassé mes attentes.
J’ai déjà hâte au prochain
marathon à Montréal le 24
septembre. Il n’aime pas
nécessairement le parcours mais
se sacrifiera pour moi, pour me
rendre hommage. Suivront Albany
dans l’état de New York et le
P’tit Train du Nord, ces deux
derniers en octobre.
Afin d’afficher sa présence, il
a dû reporter ses vacances qu’il
prévoyait prendre en octobre.
Pire car pour le marathon de
Montréal, il doit présenter un
spectacle avec les chansons de
Gerry… à Alma ! En plus, il
s’agira d’une dernière
représentation.
Savez-vous quoi ?
Il donnera son show et demandera
à une personne de son équipe
technique de le conduire à
Montréal pendant la nuit alors
qu’il dormira dans le bolide !
Wow ! Je n’en reviens tout
simplement pas.
Bravo Mario, tu as toute mon
admiration.
J’ai déjà hâte au marathon de
Montréal !
Statistiques de mon 78e marathon
Temps : 4h11 :27
Classement général : 568 sur
1042
Classement catégorie d’âge : 28
sur 62
Daniel Lequin
danielmedaille@hotmail.com
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