Une Nouvelle. La poutine est née, aussi, à Sorel-Tracy. Loin de moi d’enlever à certaines villes des Bois-Franc, la paternité d’avoir inventé la fameuse poutine. Laissons-les revendiquer qui a eu l’idée, en premier, moi j’ai la mienne. L’histoire nous apprend, qu’il peut se produire, en simultané, dans des endroits différents, des créations, des inventions semblables. Ce fut, sans doute, ce qui arriva, dans le cas présent.

En replongeant, dans mes souvenirs d’adolescent, je me rappelle assez bien, le moment où j’ai goûté à la poutine, pour la première fois dans un restaurant à Sorel. Ce fut à la fin des années 50. Comme d’habitude, mes amis et moi, après une escapade joyeuse au centre-ville, nous arrêtions au restaurant Chez Lambert. Bien assis, le cœur joyeux et enjoué nous racontions, à tour de rôle nos « actions d’éclat », nos bravades et les dernières blagues de la semaine en éclatant d’un fou rire contagieux et quelque peu dérangeant. Notre serveuse préférée, la belle Jeannine avec sa chevelure rousse, son beau sourire radieux et sa démarche ondulée prenait notre commande : « Alors les garçons, comme d’habitude, une frite sauce et un coke, c’est tout, c’est « parfât » comme ça …»

Un certain vendredi, un d’entre nous nous invitait à ne pas manger trop vite notre frite sauce.  « Les gars j’ai une commission à faire au Marché Richelieu, pour ma mère. » Quelques minutes, plus tard, il se pointa avec un sourire intrigant, tenant un petit sac de papier brun. Tous nous avons froncé les sourcils. « Il y a quoi là-dedans »?  Surprise mes amis, rapidement, il mit dans chacun de nos plats des « crottes » de fromage doux. Il ne fallait pas que M. Lambert, le propriétaire, s’aperçoive du manège de notre amis. C’est ainsi que fut apprêtée et servit la première poutine à Sorel-Tracy, officieusement…!

Rapidement, les autres restaurants de la ville et de la région ont emboîté le pas. Le plat était lancé, des frites dorées, nappées d’un succulente sauce brune dans laquelle flottait le savoureux fromage de la laiterie de Sorel.

D’autres mets ont vu le jour, chez nous : la guédille, le fameux « musicien 1» du restaurateur Paul Rheault, sans oublier l’ancestrale et renommée gibelotte des familles Beauchemin, de l’île d’Embarras à Sainte-Anne-de-Sorel.

Bon appétit
Jean Rajotte

1Nommé ainsi en l’honneur des musiciens qui se produisaient au Marine Cabaret de l’Hôtel Saurel