Le
texte ci-dessous fait suite, du moins en quelque sorte, à un mien
article paru dans Le
Devoir du vendredi 23 août
2002 et qui s'intitulait : «
Halte à la "mickeymousification" du paysage ». La
version intégrale de cet article se trouve également dans le SorelTracy
Magazine – voir la liste
de mes textes (il s'agit du huitième à partir du bas).
Alors
que s'intensifie la «mickeymousification»…
Tant que le progrès se mesurera en mètres carrés
d'asphalte, tant qu'il y aura des maires pour s'attacher en priorité
à cultiver leurs accointances avec les présidents de Chambre de
commerce, il ne faudra point s'étonner de voir le scénario de «Guindonville»
se répéter ailleurs – avec de légères variantes, c'est sûr,
mais toujours avec le même dénouement : exit
les démunis, enter les bulldozers!
Alors qu'Intrawest
poursuit à coups de millions la
«mickeymousification mur-à-mur» d'un mont Tremblant devenu
sien (lire : déquébécisé), tout ce qui sévit comme promoteurs
dans un rayon de 50 kilomètres autour du piège
à touristes cinq étoiles s'active et suppute à tout-va en
salivant par anticipation. Ces «brasseurs d'affaires», néophytes
ou aguerris, flairent la bonne… affaire : «
Faut profiter de la manne, man!
»
Or, pour être en mesure d'accueillir, que dis-je, de
gérer «décemment» la grande marée des touristes, égarés ou
non, en route pour la Mecque
du clinquant, les petites villes relais – comme Val-David,
tiens donc! (ou Guindon?) – ont tout «intérêt» à penser et à
faire à l'américaine, en commençant par se doter de cet
incontournable et ô combien basique élément d'infrastructure
que sont les parkings. Oui, messieurs-dames, des parcs de
stationnement dignes de ce nom, histoire d'inciter tout ce beau
monde plein aux as à ne pas faire que passer, mais plutôt à
descendre de bagnole et à laisser chez l'indigène un peu de ces
beaux dollars bien forts… devant lesquels, on vient de le
constater, des maisonnettes à loyer modéré ne font pas le poids.
Tant pis! On n'arrête pas le
progrès… (Avis par les présentes est donné à nos cousins
d'outre-Atlantique qui «trippent» ceinture fléchée : la cabane
au Canada, devenue anachronique, a pris le bord sur un temps riche!)
Ah!
les fameuses RETOMBÉE$!
Soucieux donc de tirer profit$ (sic) de l'immense
pouvoir d'attraction du complexe récréotouristique «mis bas» par
Intrawest, plus d'un
conseil municipal d'opérette – voire d'opéra bouffe
(mot de même origine que… bouffon)
– ne ménagera aucun effort ni aucune mesure draconienne pour «dégager»
son territoire, le rendre accessible aux sacro-saintes RETOMBÉE$, quitte à sacrifier au passage le modeste gîte de
quelques sujets jugés moins «productifs» : de pauvres bougres ou
des citoyens de troisième ordre dont le compte de taxes ne «rapporte»
guère de toute façon, pas vrai, m'sieu le maire?…
La
fierté «maganée»…
Étant entendu que l'argument financier fait basculer
toutes les hésitations, balaie les moindres doutes et file bonne
conscience aux «développeurs» à tout crin, le seul moyen de défense
dont semblent disposer les évincés
en puissance, c'est de se rendre «intéressants» aux yeux des
touristes et, partant, des édiles municipaux, lesquels, hélas! ont
encore droit de vie ou de mort sur ces «tout-nus» qu'ils sont
pourtant censés représenter et… défendre (?!?).
Ainsi, pour conserver leur toit, il eût peut-être
suffi aux citoyens de «Guindonville» d'accepter de devenir objet de curiosité (j'ai failli me laisser aller à écrire bêtes
de cirque) au bénéfice des nombreux visiteurs payants.
En effet, on aurait alors circonscrit le lieu d'une promenade avec
bancs de parc et clôture de «broche» placardée d'écriteaux
explicatifs à intervalles réguliers : « Voici, évoluant dans
leur habitat naturel, les derniers spécimens d'une espèce en voie
d'extinction : du monde pas riche, mais encore fier, indépendant
et… heureux! »