La
plante vivace dans La forest ténébreuse
Guy Laforest et Robert Laplante par
Devoir interposés
du 28 novembre 2002
Il est étonnant de constater, véritable
phénomène sociologique en soi, combien, lorsqu’ils abordent l’univers du
politique, certains individus passent subito de la scientificité
respectueuse des idées au dénigrement le plus trivial des personnes, et ce
à l’exemple – formation réactionnelle réinvestissant ses sources
pulsives ? – de ces gens qui bondissent allègrement de la vertu d’hier
la plus rigoriste à la licence la plus débridée du jour (Ah ! dira-t-on :
« Depuis l’temps qu’ils en rêvaient dans leur couche nickel, ces bégueules
solitaires… »).
En écoutant M. Laforest et l'ADQ nous
entretenir depuis quelques années de « changement » à la
duplessiste manière, on comprend au quart de tour en quoi la régression
(dans le passé et dans l'obscurité tout à la fois, fond et forme confondus)
constitue, de fait, un authentique changement. Pas moyen de le nier, en effet.
Le professeur de l'U. Laval a ici la logique pour lui : la mutilation
lobotomique, ça change son homme M’dame ! Or dans son article, pointant
incidemment l’ADQ et le PLQ, Laplante écrivait ceci : « Aucune
injustice n'est jamais trop grande, aucune humiliation trop cuisante, aucune
perte n'est jamais trop funeste pour remettre en cause le lien canadian. Rien de
ce qui a de la valeur pour le Québec n'en [n’]aura jamais assez pour renoncer
au Canada. » La boucle, strangulatoire, est bouclée.
Alors voici.
Les plus crédibles représentants politiques et porte-parole sociaux du
Québec ont depuis quarante ans témoigné d’une dignité sans pareille dans
le combat pour la défense, la promotion et l’achèvement du fabuleux projet
d’émancipation de la différence française en Amérique. Je saisis donc fort
bien désormais – je dessille enfin les paupières – quel type de
changements réclament le politologue et l'équipe adéquiste. Il faut savoir
toutefois qu’en jetant la dignité aux orties (de moratoire sur l’essentiel
en assourdissantes abstentions en Canadian Club), ne reste autre voie,
autre choix, que celui de la prostitution.
M. Laforest, dussiez-vous vivre deux
cents ans, je ne crois pas, sur l’échelle de l’excellence, que vous
parviendriez à renforcir le Québec – tel un matériau noble – au-delà du
mi-mollet du grand argentier et ex-Premier ministre du Québec, que vous avez
ici pourtant injurié de chenue manière par vos propos tendancieux jusqu’à
la malhonnêteté intellectuelle. Aussi m'est d'avis que votre discours en
raconte infiniment plus long sur votre nanisme de pensée que – ô aberration
en parfaite contradiction avec la carrière de l'individu – sur la présumée
fermeture « ethnique » de M. Parizeau.
Plus je vous entends, vous lis et vous écoute,
M. Laforest**, plus je comprends avec clarté les craintes
publiquement exprimées récemment par l’auteur d’« Il me reste un
pays ». Qui sont celles d’une jeunesse éternelle, et certes pas
celles d’un « vieillard » qui tremblote (devant, « émigrés
de l’intérieur », quelque Marc Lalonde ou André Ouellet d’autrefois)
à l’idée de perdre sa pension. Ou ses oranges.
Jean-Luc
Gouin *
« La campagne des capitulards » : http://www.ledevoir.com/2002/11/19/13675.html
** « moins
je vous aime… », aurait pu ajouter Alain Barrière ? lundi 10 mars 2003 |