D'entrée, j'avoue ne pouvoir
me targuer d'objectivité lorsqu'il est question de VLB, car, depuis Race
de monde, je suis inconditionnellement accro à la prose télévisuelle
du bonhomme. Allez savoir pourquoi! C'est peut-être parce que, mieux que
personne, il sait incarner l'imaginaire le plus flyé dans un
réel qui se permet d'affecter des airs de quotidien faussement
rassurants. Ce qu'il nous offre en partage, c'est une folie – au sens
noble du terme – qu'on peut presque toucher du doigt tant elle caracole
à hauteur d'âme.
Devant
nos yeux souvent ébahis et parfois incrédules, il réussit à faire vivre
à ses personnages de fugaces et fulgurantes parcelles d'éternité, tout
comme de larges pans d'existence erratiques, autant de « mises au
monde » uniques qui, autrement, seraient restées de drôles d'idées
condamnées à macérer un certain temps, et en pure perte, dans un cerveau
en perpétuelle ébullition, pour finalement se dissoudre jusqu'à l'oubli.
Aux êtres peuplant les mondes parallèles qu'il met en scène dans ses
téléromans, VLB fait dire des choses qui transcendent la plate et ô
combien prévisible normalité, seul état bien reçu dans la bonne société
qui, on le sait, se méfie de la marge, craignant sans doute de s'y
retrouver autrement qu'au seul titre de spectateur voyeur.
Ce n'est
donc pas un hasard si nos plus belles « bêtes de scène » (de Gilles
Pelletier à Jean-Louis Millette, en passant par Paul Hébert, Michel
Dumont, Gisèle Schmidt, Nathalie Gascon, Gilles Renaud, Monique Miller,
Gérard Poirier, Yves Desgagnés, etc.) en ont littéralement « mangé », du
VLB, trop heureux de pouvoir évoluer, s'exprimer – s'investir comme
acteurs, tout en s'éclatant, quoi! – dans un véritable univers-théâtre
créé sur mesure pour les passionnés qu'ils sont! En d'autres termes, les
« lignes » véelbéennes étalées sous leur nez, c'était et ça demeure du
stuff de pro, pas de la grenaille alimentaire pour perroquet
savant!
Au sein
de la gent comédienne, donc, ça s'est toujours bousculé au portillon
pour aller « jouer » dans les œuvres – lâchons le mot – « spéciales » de
VLB, auxquelles d'aucuns prêtent d'indéniables vertus cathartiques
(lire : « défoulatoires »). Les téléspectateurs ont toujours suivi,
rarement en nombre suffisant au goût du diffuseur, mais pas mal sont
encore là – fidèles au « poste », comme on dit –, à la fois babas et
déçus qu'on vienne de la sorte leur « obscurcir le ciel ».
Un ciel plus sombre, ou les
« bleus » de VLB
En
passant, à l'heure où Le Bleu du ciel subit à son tour le
traitement « dégommage » réservé naguère au Volcan tranquille de
Pierre Gauvreau, peut-être est-il de mise de se demander si le silence
de tous les « porte-verbe » de VLB rime davantage avec convergence
qu'avec impuissance…
Cher
Victor-Lévy, je vous le demande : où diable vais-je donc pouvoir trouver
« une bolée d'air frais » dans toute cette téléréalité insipide que je
refuse de me taper? Quand le reflet est plus fidèle que l'original et me
renvoie l'image trop nette
d'une tribu de « chromés » dont les ânonnements et borborygmes sont à
prendre au premier degré, je décroche. Cet étalage monocorde et
monochrome qu'on nous propose, ça nous change un peu trop radicalement
de vos élucubrations les moins douces. De quoi s'ennuyer de votre style
souvent taxé de tarabiscoté… Voilà!
Pour le
reste, dans la « réaction » de VLB, je ne vois pas tant un dépit
d'enfant gâté à qui l'on vient de retirer sa « bébelle » qu'une immense
et très amère déception à l'égard de « notre » télévision publique. Rien
qu'à voir les décisions et les orientations ou virages à 180 degrés
qu'elle a pris et continue de prendre ces derniers temps, la Société
Radio-Canada, hélas, ne fait pas que s'écarter de son mandat premier,
elle s'en détourne résolument, s'en éloigne de façon inexorable. Un TVA
et un TQS, c'était pourtant déjà « ben en masse », non?!
Quant à
la sortie pas très politically correct de VLB contre Tout le
monde en parle, disons que c'est son avis… et que je le partage à
110 % (excusez-la!). Selon moi, pour un débat d'idées digne de ce nom,
il nous suffit d'oublier la soirée du dimanche servie ad nauseam
par Ti-Guy A. pour regarder plutôt du côté de ma'me Bazzo, le vendredi à
Télé-Québec… C'était ma plug du jour!
En
terminant, histoire de bien montrer que, même privés d'une grosse partie
de notre ration de « tivi » intelligente, il ne faut jamais désespérer
ni cesser de rêver en couleurs, je crie urbi et orbi : à quand
une télé publique sans pub… comme la radio de Joël et de René?!?