lundi 13 août 2012
Cet ami que je ne connaissais
pas : Hommage à
Michel
Polac
Ce 7 août 2012 Michel Polac,
homme de lettres et de parole
français, a pris congé des
hommes.
Et des femmes.
Et sans doute, on peut le
subodorer, je pense, dans un
soupir... de soulagement.
Il avait 82 ans. Sans le
connaître personnellement,
je l'estimais et l'estime
toujours. Beaucoup.
D'outre-Atlantique.
Je me souviens en particulier de
ces fameux « Droit de réponse »
que nous captions par le câble
en pays des René Lévesque et des
Félix Leclerc (Dieu ! que nous
sommes aujourd'hui plus
provinchialeux que jamais) par
le biais de la défunte
chaîne « 99 ».
Michel Polac disait ce qu'il
pensait. Carrément, et sans
détour. Mais attention ! Pas
pour la galerie, pour le plaisir
gamin de la provocation ou pour
en tirer quelque publicité.
Simplement parce qu'il le
pensait. Tout bonnement. À tort
ou à raison, bien sûr (peu
importe en dernière analyse).
Quoique toujours, congruence
oblige, avec un droit de réponse
à la clé... Et surtout, ce qui
est plus rare encore, il pensait
d'abord, et vraiment, ce qu'il
disait. Avant de le dire.
Précisément.
Car, c'est bien connu, ce n'est
pas parce que l'on dit (tout) ce
que l'on pense que l'on pense
toujours (tout) ce que l'on dit.
Bref, Michel Polac c'était autre
chose que ces gens qui ne
s'instruisent que pour ajouter à
leurs préjugés, comme l'écrivait
naguère Albert Brie – le fameux
« Silencieux » du Devoir d'autrefois.
Étonnant carrefour des
événements, tout de même :
j'avais déjà écouté dans les
tout derniers jours, et avec
grand intérêt, les trois
premières des quatre émissions
radiophoniques qu'il avait
conçues, alors jeune homme,
en... 1958, pour la Chaîne
parisienne. Lesquelles
consistaient en reportages – en
mouvement continu – sur les
États‑Unis d'Amérique. Et qui se
sont vues rediffusées cet été
chez France Culture, du
31 juillet au 3 août, dans le
cadre de la programmation des « Archives
du Continent ». Se
pourrait‑il qu'il ne s'en soit
pas remis…?
J'écouterai la dernière ce soir.
Avec, on l'imaginera sans peine,
avec grand'peine aussi, une
émotion toute particulière.
Car enfin, je les avais
téléchargées ces émissions.
Pardon ! : « podcastées ». Car
même chez France Culture,
voyez‑vous, dont pourtant
j'envie, espère et appelle de
tout mon être une chaîne
équivalente en Québécie (alors
que Radio-Canada,
les antennes radio au premier
chef, a depuis longtemps sombré,
hélas, dans une
insignifiance potineuse,
commerciale, bavarde et
variéteuse à gémir de
désespoir : jusqu'aux - disons
la plupart des - journalistes
qui s'y expriment avec une
maigre
poignée de mots [barbarismes
et solécismes à la ‘chaîne’
compris] comme des adolescents
de Secondaire), car même chez France
Culture, dis‑je, où 82% des
pièces musicales présentées à la
faveur des multiples émissions
sont – Ô French Culture !
–
anglo-américaines (les Jean‑Noël
Jeanneney, fils bien‑né de ses
défunts et honorables père et
grand‑père, s'y faisant
désormais extrêmement rares), le
vocable « télécharger »
(ou autre équivalent digne de
ce nom) s'y voit pour ainsi dire
tabou. Que dis‑je ?
Interdit ! Mieux : france...
ment incompris.
À
l'instar d'ailleurs d'un rameau
impressionnant, et toujours
croissant, du
lexique de la langue française…
Ce que au reste, et qui s’en
étonnera, monsieur Michel ne
goûtait guère non plus.
Michel Polac, vous me manquiez
déjà depuis plusieurs années.
À compter de ce jour, vous me
manquerez inconsolablement.
Pourrai‑je jamais vous le
pardonner…?
Jean‑Luc Gouin
Québec, le 7 août 2012
|