jeudi 29 novembre 2012
Dans le feu de
l'action de Jean Cournoyer
par Robert
Barberis-Gervais
Jean Cournoyer
est un avocat spécialiste des
relations de travail et un
expert du monde de la
construction. C'était le genre
de négociateur patronal qui
tient compte des intérêts et des
besoins des travailleurs. Son
autobiographie décrit tous les
dossiers de négociations où il a
été impliqué et les solutions
qu'il a proposées comme
négociateur ou comme législateur
en tant que ministre du travail.
Ces solutions sont techniques et
exigent un grand effort de
lecture pour un non spécialiste.
On en comprend quand même
suffisamment pour conclure que
par son action dans ce domaine,
Jean Cournoyer est une parfaite
illustration de la pensée du
grand écrivain Marguerite
Yourcenar: "La plus haute forme
de vertu est la ferme
détermination d'être utile". Je
ne pourrais pas lui faire de
plus beau compliment.
Il se débat comme un diable dans
l'eau bénite pour se défendre
contre certaines conclusions de
la Commission Cliche qui
l'attaquent ou certaines
analyses des éditorialistes
qu'il appelle "les grands
esprits" qui ont le défaut
d'être écrites dans un bureau
alors que lui, Jean Cournoyer,
il est dans le feu de l'action
et agit souvent comme un pompier
appelé pour éteindre un
incendie. Il a eu le malheur, et
cela lui a beaucoup nui, de
faire partie d'un gouvernement
libéral qui a obtenu 102 députés
en 1973 par des méthodes
électorales douteuses qui sont
décrites dans "Ils sont fous ces
libéraux", un petit livre dont
je suis l'auteur. Et par son
association à un premier
ministre qui n'a jamais reculé
devant le terrorisme économique
et la démagogie anti-séparatiste
qui ont conduit à la crise
d'octobre.
Sa bête noire est Marcel Pépin,
président de la CSN, qui a tout
fait pour se laisser emprisonner
jouant ainsi au martyr. A
plusieurs reprises, il le traite
de lâche et d'hypocrite parce
que fort capable de déclencher
une grève, il était incapable de
l'arrêter et obligeait le
ministre du travail à imposer le
retour au travail par décret et
ainsi à en supporter seul
l'odieux. Être ministre du
travail à un moment où sévissait
André "Dédé" Desjardins dans la
FTQ-Construction, ce n'était pas
facile.
Ses réflexions élémentaires sur
la question nationale montrent
bien que tel n'est pas son
principal intérêt. Je crois
qu'il utilise au moins quarante
fois l'expression: la province.
Ses incursions dans l'actualité
sont simplement descriptives et
ne poussent pas très loin
l'analyse. Ainsi ce qu'il dit du
printemps érable passe à côté de
l'essentiel à savoir que la
stratégie d'affrontement de Jean
Charest avec les étudiants en
augmentant les frais de
scolarité et en refusant le
dialogue avait pour but de faire
diversion par rapport à la
corruption du gouvernement
libéral pour tirer un profit
électoral des inévitables
désordres accompagnant les
manifestations, désordres
souvent provoqués par la police
comme le constatera le comité
que vient de créer le
gouvernement Marois et qui
enquêtera sur les bavures
policières qui ont marqué le
conflit. Revoyez par exemple, le
matricule 728 qui pourchasse des
manifestants pacifiques et leur
envoie volontairement du poivre
noir dans les yeux.
Les passages du livre qui
parlent de l'enfance, des années
de collège et d'université, de
ses deux mariages et de sa
famille sont empreints de vérité
et de simplicité. Ce qui est
typiquement Sorelois.
L'homme aux grandes oreilles qui
arrosait les trois patinoires du
Séminaire de St-Hyacinthe pour
avoir le droit d'écouter la
description de la partie de
hockey par Michel Normandin à
CKAC multiplie les traits
d'humour mais comme ce qui fait
sourire peut varier d'un lecteur
ou d'une lectrice à l'autre, je
vous laisse le soin de découvrir
les nombreux passages teintés
d'un humour savoureux. Comme
cette citation de Michel
Tremblay citée en exergue: "une
autobiographie est une
biographie écrite par un
menteur".
Ministre des richesses
naturelles, il alla visiter en
1975 les Cris et les Inuits de
la Baie James. Le grand chef des
Cris, Billy Diamond, lui donna
un surnom cri qui signifie
"grand petit homme". Je m'en
remets à la sagesse du grand
chef des Cris.
Je serre la main à l'écrivain et
lui souhaite santé et longue
vie. J'espère que sa mère
Marie-Louise, du haut du ciel,
se réjouit de cette poignée de
mains.
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