jeudi 19 septembre 2013
Des légistes
musulmans conseillent d’enlever
le foulard pour garder son
emploi
par Robert Barberis-Gervais
Elles sont d’origine algérienne,
marocaine ou tunisienne et sont
de religion musulmane. Elles
travaillent dans un CPE, un
centre de la petite enfance,
depuis 15 ans, comme
éducatrices. Elles portent le
voile islamique depuis toujours.
Leurs services sont très
appréciés dans ce réseau des CPE
que Pauline Marois, en septembre
1997, a mis sur pied.
Si le projet de Charte des
valeurs québécoises du
gouvernement Marois devient
force de loi, elles ne pourront
plus porter de foulard pendant
leurs heures de travail avec les
enfants dans un Centre de la
petite enfance. Elles ont eu une
réaction négative devant
l’obligation qui leur serait
faite de ne pas porter un
foulard, qui est un signe
religieux ostentatoire, pendant
l’exercice de vos fonctions
d’éducatrice. Bien entendu, les
doits acquis seront respectés et
aucune musulmane qui porte le
voile sera congédiée.
Ces musulmanes savent-elles
qu'elles pourraient accepter de
respecter la Charte et la loi et
enlever leur foulard au travail
seulement tout en étant de
bonnes musulmanes?
Il faut réfléchir sur
l’obligation de porter un
foulard qui cache les cheveux et
et le cou d’une femme et ne
montre que son visage. Par
exemple, en France, les élèves
musulmanes qui portent le
foulard enlèvent leur foulard en
arrivant à l’école et le
remettent en sortant. Et que ça
ne provoque pas de drame.
Une simple recherche au mot «
hijab » sur wikipedia nous
apprend l’étonnante diversité
des opinions et des pratiques
quant au port du voile à travers
le temps et à travers les pays,
musulmans ou non. Une phrase a
attiré notre attention parce
qu’elle pourrait guider les
musulmanes québécoises dans la
décision de porter le voile ou
non et les dégager, sans crise
de conscience, d’une obligation
dont certains font un absolu. La
voici.
« Dans l’idée du respect du
principe général de la pleine
qualification des femmes à la
participation à la vie publique,
la plupart des légistes
musulmans tempèrent l’obligation
de se voiler si elle entre en
contradiction avec cette
participation. »
Cela veut dire que si pour
garder son emploi en garderie («
ma participation à la vie
publique ») et maintenir son
indépendance financière comme
femme, la loi demande d’enlever
le foulard sur les heures de
travail, des légistes
c’est-à-dire des spécialistes du
Coran et de l’Islam conseillent
d’enlever le foulard.
Comme on dit au Québec, il ne
faut pas être plus catholique
que le pape. Pour favoriser la
paix sociale et par respect pour
la société québécoise qui a si
bien accueillies ces
immigrantes, elles pourraient
décider de contribuer à
l’harmonie générale en
respectant la loi.
Elles montreront ainsi leur
reconnaissance envers ce Québec
qui a mis sur pied un réseau de
garderies à prix modique qui
permet aux femmes de faire des
choix selon leurs valeurs. Ce
Québec qui a donné tout de suite
aux nouveaux arrivants une carte
d’assurance-maladie qui donne
accès à des soins de santé de
qualité. Ce Québec qui favorise
la famille par les congés
parentaux de maternité et de
paternité et qui permet de vivre
en toute sécurité avec une
aspiration à l’égalité
hommes-femmes qui est une valeur
québécoise.
A tort ou à raison, on qualifie
d’intégristes celles qui portent
le foulard à tout prix et en
toutes circonstances. Car en
observant la variété des
pratiques à propos du foulard
dans l’ensemble du monde
musulman et chez les musulmanes
mêmes, on voit bien que
l’obligation de porter le
foulard n’est pas un absolu. On
peut être une excellente
musulmane et ne pas porter le
foulard. On peut vouloir
respecter l’exigence du Coran
qui dit à la femme d’être
modeste dans ses vêtements ;
mais pour être modeste, est-ce
vraiment obligatoire de porter
un foulard ? Nous croyons que
non. Au lieu de laisser croire
qu'elles sont intégristes ou
fondamentalistes, ne serait-il
pas préférable qu’on dise
qu'elles font leur part pour
s'intégrer à cette société où il
fait si bon vivre. Le Québec
donne beaucoup par son art de
vivre et les services qui sont
offerts. A leur tous de rendre
une partie de ce qu'elles ont
reçu.
Les immigrants qui viennent
vivre au Québec devraient faire
des efforts pour s’intégrer à la
culture et (à la langue) de la
majorité au lieu de tenter de
imposer leur culture surtout
quand elle relève du
fondamentalisme religieux (comme
le foulard, par exemple), une
sorte d’intégrisme religieux
hautement contestable et que le
multiculturalisme encourage à
coups de charte des droits sur
la liberté religieuse vue comme
un absolu même dans ses
particularismes les plus
contestables.
Au nom de la neutralité de l’Etat,
on demande qu’il n’y ait pas de
signes religieux ostentatoires
chez les employés de l’Etat.
Vous êtes des des femmes libres.
Vous exercerez cette liberté en
ne portant pas de foulard
pendant que vous travaillez dans
votre garderie. Pour le bien de
la collectivité dont vous faites
partie et en tenant compte de
l’intérêt général et de
l’intérêt des enfants, vous
accepterez volontairement
d’appliquer la Charte des
valeurs québécoises. Et vous
susciterez l’admiration de tout
le monde à cause de votre
ouverture d’esprit et de votre
générosité.
Vous empêcherez ainsi qu’on se
serve de vous à des fins
politiques, comme prétexte pour
accuser le gouvernement Marois
d’intolérance ou de xénophobie.
Vous pouvez accepter de vous
inclure vous-même en enlevant
votre foulard qui est un signe
religieux ostensible qui nie la
neutralité souhaitable des
employés de l’Etat. Et vous
resterez de bonnes musulmanes
comme le disent des légistes,
spécialistes du Coran et de
l’islam.
Robert Barberis-Gervais,
Vieux-Longueuil,
jeudi 19 septembre 2013
barberis@videotron.ca
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