mardi 01 avril 2014
En attendant
mon fils, t’as raison, c’est
tout le reste qui paraît un peu
plus débile
Par James
Morgan
Il était une fois un père et son
fils qui pêchaient les étoiles
assis sur la Lune. Le fils
avança en dévisageant l’énorme
figure ronde et bleutée qui
s’imposait devant lui et risqua
la question suivante: « Père
comment nomme-t-on le trou qui
sévit sur le front de ce sieur?
». Alors le père renseigna
prestement le petit : « Ha ça !
Mon fils c’est une intervention
chirurgicale nommée la
lobotomie, elle consiste à
perforer et amputer une partie
importante de l’anatomie du
sujet dans le but clair de le
rendre apathique et débile, mais
il arrive quelque fois que l’on
nomme différemment la chose … ».
«Ha oui! Et comment alors papa
?» « Et bien par exemple mon
garçon, au pays de ce trou
particulier, les gens lui
donnèrent le nom de sables
bitumineux albertains et cette
opération fut prodiguée
bizarrement sous les
encouragements constants du
peuple et des gouvernements les
représentants. « Mais père avec
ce trou c’est tout l’ensemble
qui paraît un peu plus débile!
». «Yep ! Tu l’as dit mon fils,
tu l’as dit ».
Il n’y a pas si longtemps,
j’avançais l’idée que
l’honorable M. Stephen Harper
eût été un espèciste ou en
d’autres mots un être qui
n’hésite pas à entretenir avec
les autres espèces qui
complètent dignement notre
biodiversité un impérialisme
fâcheux et orgueilleux.
Les espècistes traitent avec
hauteur, négligence et le plus
froid utilitarisme le vivant
non-humain et croient
injustifiée une considération
empathique du sort des autres
espèces et se refusent à croire
qu’ils puissent exister une
autre vision de la cohabitation
entre vivants que l’issue d’une
vaste chaîne alimentaire.
Irrémédiablement, on remplace la
synergie de la vie par la
hiérarchie des vivants avec les
dégâts qu’on lui reconnait.
C’est le 12 janvier 2014 que
l’on apprenait que la courroie
canadienne sur le respect animal
venait de serrer d’un cran sa
supériorité. Désormais, le sort
des espèces aquatiques sera
confié à l’office national de
l’énergie. Or donc, à savoir si
oui ou non le passage d’un
pipeline dans les fonds marins
canadiens doit être considéré
comme une menace pour les
poissons…. la réponse nous
viendra de la très haute
expertise et sifflante
compétence en matière de survie
aquatique de l’O.N.E. Bien sure,
l’O.N.E. vante à tout rompre son
savoir-faire et son savoir-être
en matière de poisson qui n’a
pas son pareil dans tout
l’appareillage canadien même
chez l’ancien responsable de
notre fragile univers aquatique;
Pêches et Océans Canada.
Prenez trente secondes et
relisez le passage précédant.
Fermer vos yeux, respirer,
imaginer ; y’a Rocco Siffredi
qui ferme une porte mi-close
dont l’embrasure lumineuse met
en valeur une resplendissante
vierge de trente-six ans. Une
fois la porte fermée peut-on
sérieusement souhaiter que la
chose se fasse sans douleur,
sans cris et sans souvenirs
marquants. Hey Harper !
Rendu–là, ce n’est pas une
question de savoir-faire,
d’expertise ou de génie, le
malaise de cette stupéfiante
stupidité réside dans la nature
propre des sujets de cette farce
expérimentale.
Mais le plan destructeur de
l’homo sapiens-sapiens-canadian
est plus vaste et historique.
Au-delà des petits poissons et
de leur faune poisseuse, le
gouvernement Harper prend siège
au sommet du mont Jasper et
déballe son fiel dans des veines
noires qui s’étendent,
tentaculaires et asymétriques,
comme une menace grandissante
sur l’ensemble de la
biodiversité mondiale.
Le gouvernement Harper rit de
bon cœur de son titre de cancre
écologique. Ce pays, selon le
climate change performance index
2014, se retrouve « ainsi au 55’ième
rang des 58 pays pris en compte
dans le rapport, devançant
uniquement l’Iran, le Kazakhstan
et l’Arabie saoudite. Le Canada
se classe dernier au sein du G8
et avant-dernier parmi les
membres du G20 (Devoir,
déc.2013, B3)». Ce même rapport
dépeindra comme suit le Canada
d’Harper; « Comme l’an passé, le
Canada ne montre aucune
intention d’avancer en matière
de politique climatique et
demeure donc le pire de tous les
pays industrialisés. »
Un clash identitaire, cette
fois-ci sur le plan du
développement économique, se
fait sentir immédiatement entre
le Québec et son mauvais patron,
le Canada qui obsède
dramatiquement plus sur sa
machine à imprimer des
pétrodollars que sur la capacité
du Québec à offrir une économie
verte.
Selon la commission sur les
enjeux énergétiques du Québec (CEEQ),
les faibles coûts, l’abondance
et la stabilité de
l’hydroélectricité québécoise
offrent aux entreprises une
assurance opérationnelle qui
positionne stratégiquement le
Québec dans le contexte
énergétique de l’Amérique du
nord. « En plus de cette
capacité du Québec à attirer des
entreprises économiques à valeur
ajoutée et fortement
consommatrices d’électricité, le
nouveau contexte énergétique
offre des occasions d’affaires
que le Québec doit saisir et qui
permettront d’écouler les
surplus énergétiques. Parmi ces
occasions, notons le
développement du Nord québécois,
l’hydroélectricité québécoise
comme source d’équilibrage pour
l’éolien sur les marchés
extérieurs ainsi que
l’électrification des moyens de
transport. Ces actions feront du
Québec un leader de l’économie
verte » nous disait D. Laplante,
de l’AIEQ, le 9 mars dernier
dans le journal le Devoir, B5.
Or donc le Québec a le potentiel
de se révéler un leader de
l’économie verte mais à quoi bon
l’être si ce n’est que
moralement dans un contexte où
il n’est qu’un pion de
contrepoids dans un Canada
résolument cancre
écologiquement.
La vérité de nature plus cruelle
et franche indique que seule la
souveraineté du Québec et la
pleine gestion de nos impôts
pourraient permettre de se
développer selon nos intérêts
économiques et par un heureux
hasard ces intérêts se
retrouvent en plein centre des
enjeux économiques du prochain
siècle. Ainsi, le Québec est une
terre promise qui doit en finir
avec son statue de terre soumise
pour qu’il y naisse une économie
verte gage d’un avenir prospère.
En attendant ce jour de
reconnaissance et de célébration
de notre beauté, de notre
potentiel et de nos valeurs, les
québécois devront garder les
mains propres s’ils veulent
pointer du doigt. En ce sens, le
gros du travail consistera
surtout d’arrêter d’être les
pires gestionnaires de matières
résiduelles d’Amérique du Nord,
ainsi que de cesser d’être les
plus grands gaspilleurs d’eau
potable au monde.
James Morgan
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