lundi 08 décembre 2014
AU DELÀ DE LA
GUIGNOLÉE
Lettre ouverte à :
Monsieur Philippe Couillard,
Premier ministre du Québec
Monsieur François Blais,
ministre de l’Emploi et de la
Solidarité sociale du Québec
Messieurs,
Les organismes communautaires en
défense collective des droits de
la Montérégie sont inquiets de
l’avenir que votre gouvernement
leur réserve. Votre décision de
renouveler leur financement pour
une très courte période, soit
dix-huit mois plutôt que trois
ou quatre ans, tel que promis,
nous interpelle quant à vos
intentions futures face à ces
organismes qui ont largement
contribué au modèle québécois
fondé sur les droits humains,
l’égalité et la justice sociale.
Nous aimerions vous rappeler le
rôle essentiel que jouent nos
organismes dans nos communautés
respectives.
La plupart de nos organismes ont
été créés dans les années 80
afin de permettre aux personnes
et aux familles, notamment
celles à faible revenu, de mieux
connaître leurs droits et de les
faire valoir auprès des
décideurs publics. Ils ont
permis à de nombreuses personnes
et familles d’avoir accès à une
source de revenu lors d’une
perte d’emploi ou d’une maladie,
à des conseils en matière de
consommation et de budget, à des
services adaptés et à la
reconnaissance de leurs droits
pour les personnes handicapées,
à un logement décent, à la lutte
pour l’égalité des femmes, etc.
Les groupes de défense
collective des droits ont de ce
fait participé à la lutte contre
la pauvreté, ainsi qu’à l’essor
de la démocratie participative
au Québec.
Dans le contexte actuel
d’austérité, nous aimerions vous
rappeler que moins de 38 % des
chômeurs se qualifient
actuellement à
l’assurance-emploi, que les
familles québécoises sont
endettées à plus de 160 % de
leurs revenus, que les
travailleurs au salaire minimum
n’atteignent même pas le seuil
de faible revenu établi par
Statistiques Canada, que
l’accessibilité à l’aide
sociale, aux soins de santé et à
l’éducation est réduite. Doit-on
aussi rappeler que la hausse des
tarifs des services (frais
d’électricité, de garderie, de
scolarité, etc.) contribue au
recul historique des droits en
cours actuellement ?
Faut-il rappeler, en cette
période de Guignolée, que
l’appauvrissement collectif est
tel que les banques alimentaires
sont non seulement fréquentées
par des itinérants, des assistés
sociaux ou des chômeurs, mais
aussi par des travailleurs à
temps plein ? Que ces familles,
malgré la générosité de
l’ensemble de la population,
vivent dans la faim non
seulement à Noël mais durant
toute l’année ? La détérioration
des conditions de vie des
personnes et des familles
s’accompagne trop souvent d’une
détérioration de leur santé
mentale. Nos organismes en
défense collective des droits en
sont, chaque jour, les témoins
de première ligne.
Avec le peu de moyens dont ils
disposent (une moyenne annuelle
de 49 000 $ par groupe), les
organismes en défense collective
des droits de la Montérégie
portent à bout de bras la
promotion et la défense des
droits sociaux et économiques.
Ils tentent de soutenir les
personnes et les familles de
notre région dans leurs
démarches pour l’amélioration de
leur condition de vie et de
travail.
Ces organismes que vous semblez
vouloir balayer sous le tapis
appartiennent à chacune des
communautés du Québec et sont
garants d’une démocratie vivante
et forte au Québec. La politique
gouvernementale en matière
d’action communautaire adoptée
en 2001 a reconnu le rôle
essentiel de ces groupes :
« Plusieurs des
transformations sociales sont
nées des luttes du mouvement
communautaire au Québec. […] Les
organismes qui la composent ont
ainsi joué un rôle important
dans l’évolution de la défense
collective des droits au Québec.
Le gouvernement du Québec
reconnait l’apport particulier
et essentiel des organismes à la
vitalité du débat démocratique
entourant les problématiques
liés à l’exercice des droits
fondamentaux et plus
spécialement des droits sociaux.
» (p. 28)
Messieurs Couillard et Blais,
nous vous demandons d’annoncer
publiquement, et ce, dans les
plus brefs délais, le maintien
et le rehaussement du
financement des organismes en
défense collective des droits du
Québec, reconnaissant par le
fait même le travail
exceptionnel des personnes qui
œuvrent au sein de ces
organismes dans des conditions
trop souvent de précarité.
Geneviève Latour
Regroupement des assistés
sociaux du Bas-Richelieu
Alain Turgeon
Regroupement des chômeurs et
chômeuses de la région
Sorel-Tracy
Josée Harnois
TROVEP Montérégie |