mardi 07 janvier 2014
Criq-Caq-Croq
Sorel-Tracy, le
28 décembre 2013,
Ce matin en
noyant les céréales de mes
enfants, la symphonie musicale
oeuvrant à l’accoutumé comme la
rosée dans ma cuisine avait mué.
Elle avait désormais la cadence
boiteuse, elle éraillait,
persiflait et bataillait. On
aurait dit qu’elle conjurait un
mauvais sort triste, inutile et
avilissant. Les oreilles
écarquillées au désespoir, je
perçus l’infamie; le Craq du
Criq-Craq-Croq avait laissé
tomber son R pour devenir
maintenant Caq.
Pris d’une
souveraine panique, mes neurones
gorgées d’insécurité battaient
des cils vitesse grand V.
Inquiet du rictus malin qui
sévissait sur mon visage, je
verbalisais tel un crieur de
mort les questionnements qui
m’enfargeais l’esprit : Que
ferait le nouveau Caq sans son R
de la révolte devant le cowboy
« espèciste » d’Harper (Honeycomb)?
ou qu’adviendrait-il de lui sans
son R de la résistance face au
séduisant toucan Couillard et sa
palette de couleurs et de
saveurs, emblème du
multiculturalisme économique (Froot
loops) ? ou encore
piaffera-t-il, sans son R de la
révolution, devant les lettrés
et les sages d’Alphabits (PQ) ?
Sans oublier l’impétuosité de
Tony le tigre Mulcair et son
orange enivrant ou encore le
petit côté givré du fils de
l’autre magouilleur
pré-commandite ? Bouleversé, je
constatais à regret que cette
mutation subite mettait en péril
toute la musicalité de mon
enfance et par surcroit
l’équilibre de notre joute
politique nationale.
Les québécois
s’approprieront tôt ou tard le
droit de se gérer et d’évoluer
selon leur propre intérêt et
selon le dessein qui leur sied
le mieux. Seul le temps que cela
prendra demeure inaudible à
cette épopée d’une beauté
indicible. Or bon an mal an,
lorsqu’un peuple se dote de la
prérogative d’œuvrer en tant que
maître chez soi, il ne reste
politiquement que peu d’option
soit; être pour ou être contre!
Mais il y a les hésitants, les
rationnels-insécures, les
blafards, les coincés, les
balances, les casaniers, les
albinos, les tourmentés, les
vertigineux, les alarmistes…
Bref, tout ce beau monde doit
avoir écho à l’assemblée
nationale et c’est le
job, dans un système électoral
où s’opère un mode de
scrutin uninominal majoritaire à
un tour, de la
troisième organisation politique
soit le Craq désormais réduit à
la Caq.
La défunte ADQ
jouait un rôle d’une importance
capitale dans le discours et
l’évolution de la pensée
politique québécoise. En
proposant la seule troisième
option intelligible dans le
concert de klaxon de notre
politique nationale, l’approche
constitutionnelle, les
adéquistes servaient grandement
et fièrement l’arène politique
et n’eut été des exactions ultra
conservatrices de ce parti, il
faut admettre qu’il poussait ses
adversaires politiques vers
l’avant et l’innovation.
L’imagerie
populaire politique se scindait,
dès lors, en trois grandes idées
; être un pays, être une petite
province dans un grand pays ou
être une grande province dans un
petit pays. Et chaque moment de
notre histoire où ces trois
modes de pensée se sont
polarisés à leur maximum ont
mené à des revirements
historiques significatifs où la
latence du statu quo devenait
intolérable pour tous.
L’ignominie
désastreuse se conjugue en perte
de temps considérable pour les
québécois car notre troisième
voie à l’assemblée nationale
nous propose le statu quo
souverainiste. Comme me le
dirait Polo mon voisin ado ;
« De Kessé ? ». Polo avec sa
question à deux balles résume
bien la profonde insignifiance
de ce positionnement politique
carrément hors du ring.
Mais les
penseux et les licheux
d’enveloppes brunes savent très
bien à qui rapporte cette
position. Le statu quo est une
machination où l’obsession du
surplace rapporte à ceux qui
sont en place et qui y règne en
maître, plus le système se
statufie plus la machine
s’empiffre et s’ankylose jusqu’à
ce que son obésité morbide
éclate et recouvre la nation de
son fiel. Or sachez que lorsque
les caquistes s’annoncent en
Eliot Ness vertueux, c’est
plutôt un mensonge gros comme
Nessie que les québécois
reçoivent en pleine gueule, du
flanc patenté pour que le statu
quo nous fige dans le cynisme et
que nos ressources collectives
s’écoulent vers ceux bien en
place, « les deux mains sur le
volant ».
Vous allez
comprendre que j’ai souvent la
tête qui Caq car l’indéfendable
est monnaie courante chez nos
politiciens. Bastien dans La
bataille de Londres illustre le
plus simplement du monde à quel
point le Canada n’est qu’un
voyou aux allures dandies. La
constitution est le texte le
plus important qu’une nation
puisse se doter, il est la pièce
maîtresse de sa démocratie, il
cerne en substance les principes
de gouvernance et de respect des
peuples fondateurs. Une
constitution unificatrice et
endossée est ce qui différencie
un bum qu’il soit de bonne
famille ou pas, d’un chef
d’état. Or, à mon humble avis,
un provincialiste en petitesse
ou en grandeur vaudra toujours
mieux que n’importe quel
politicien cheap procrastinant
son devoir dans un statu quo
eunuque et menotté dans le
présent.
Putain que j’ai
la tête qui Caq !
Quand j’ai voulu
changer le monde par l’écriture
au STM, ses dirigeants
m’aimaient bien en opinioneux,
rôle que j’assume avec aisance,
mais en contre partie vous
verrez rarement de citations en
bas de page ou autres appuis
officiels de ma pensée. Je les
garde jalousement pour moi en
respect à mon rôle d’opinioneux.
De cette façon je m’assure de
garder en avant scène mon côté
prose combat.
Mr. Daneau,
chroniqueur au STM, a récemment
affirmé, qu’en 2014, il
s’offrirait le pourquoi du
pourquoi de son envie d’écrire.
En ce qui me concerne, la
dynamique est
obsessive-compulsive, écrire me
soulage des idées qui se
cristallisent en mots et qui
repassent en boucle dans mon
esprit jusqu’à ce que je les
couche sur papier; délivrance.
Merci à ceux qui les lisent,
vous faites partie de la
thérapie.
Bonne année 2014;
la seule chose que vous devriez
mâcher moins ce sont les mots.
Indignez vous devant le
béotisme. Souriez.
James Morgan
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