mercredi 11 février 2015
Contre le
bilinguisme des députés et
ministres québécois
par Robert
Barberis-Gervais
Sur le canal de
l’Assemblée nationale, lundi le
9 février 2015, j’écoutais avec
intérêt la conférence de presse
donnée par Québec solidaire la
veille de l’ouverture de la
session parlementaire. Françoise
David et Amir Khadir disent
qu’au lieu de couper dans les
régions et dans les services à
la population et de créer du
chômage et de l’incertitude
comme le fait la politique
d’austérité du gouvernement
libéral, il y aurait d’autres
sources de revenus possibles
comme l’imposition à 75% au lieu
de 50% des gains de capital et
des dividendes, comme l’ajout
d’un échelon dans la grille des
impôts pour donner l’occasion
aux plus riches d’apporter une
plus juste contribution aux
finances de l’Etat, comme Pharma
Québec pour gérer l’achat de
médicaments ce qui sauverait au
moins un milliard de dollars.
Québec solidaire a raison : ce
qu’ils proposent a l’avantage de
faire voir des alternatives à
l’austérité présentée par les
Libéraux comme la seule voie
possible. Ce qu’ils proposent
est juste et équitable. On
pourrait aussi taxer les
milliards de profits des banques
et des institutions financières.
Est-ce que la commission Godbout
sur la fiscalité sera ouverte à
ces propositions ? Ils en
doutent comme ils doutent que la
légère ouverture montrée pour
Pharma Québec par le ministre de
la santé Gaétan Barrette,
monsieur bâillon, aboutisse à
quoi que ce soit de concret.
Vint la période des questions.
Un journaliste cita un sondage
selon lequel la population
serait majoritairement en faveur
de la politique d’austérité du
gouvernement Couillard. J’ai
bien aimé la réponse de
Françoise David dont voici la
substantifique moelle. Si vous
donnez comme contexte à votre
question la dette et le déficit
et que vous ne présentez comme
solution que les coupures, les
gens vous diront qu’ils
approuvent les coupures et
l’austérité.
Mais quand la population verra
les conséquences de cette
politique, ils seront moins en
faveur. Il faut présenter des
alternatives et c’est ce que
Québec solidaire fait : c’est la
seule façon de combattre
efficacement la politique
néfaste d’austérité du
gouvernement libéral qui refuse
d’employer le mot austérité mais
qui, dans les faits, applique
une politique d’austérité, cette
politique qui a conduit les
Grecs à changer de gouvernement.
Puis les journalistes
francophones se firent couper la
parole pour des questions en
anglais. Et Françoise David
voulant dire que la population
prendrait conscience peu à peu
des conséquences néfastes de
l’austérité libérale a dit en
français « petit à petit »
qu’elle a immédiatement traduit
pas « day by day ». Et elle
était fière d’elle et de sa
traduction simultanée.
Moi je serais plus fier des
députés et ministres s’ils ne
s’adonnaient pas à cette
pratique de l’anglais en ne
répondant pas aux questions
posées en anglais. Répondre aux
questions en anglais est-il une
application de la notion de
français prioritaire ou de
français prépondérant au Québec
? Sans doute et c’est une autre
raison de lui substituer la
notion de français langue
commune qui découle logiquement
du français seule langue de
travail et du français langue
officielle du Québec.
Dans l’Action nationale de mars
2014, Nicolas Bourdon fait un
compte-rendu du livre
remarquable de Charles
Castonguay, « Le français langue
commune ». Il écrit :
« L’objectif de la Charte de la
langue française était de faire
du français la langue commune
des Québécois, ce qui signifie
entre autres que le français est
la seule langue autorisée pour
l’affichage et la seule langue
parlée au travail. Castonguay
estime que le PQ a longtemps
fait la promotion de cet
objectif, mais qu’il l’a laissé
tomber lors de son congrès de
2011 en faisant la promotion de
la « nette prédominance du
français ».
Le PQ en a rajouté dernièrement
: en effet, le projet de loi 60
sur la laïcité souhaite modifier
la Charte des droits et libertés
de la personne pour y inscrire
la primauté du français. Or, il
y a une différence majeure entre
la volonté de faire du français
la langue commune du Québec et
celle de le faire « prédominer
». On le constate, le concept de
nette prédominance est confus :
« Quand le français
commence-t-il à prédominer
nettement ? À 55 % ? 70 % ? 80 %
? » demande Castonguay non sans
ironie. La « nette prédominance
» invite de surcroît à tous les
compromis : rappelons-nous
Robert Bourassa et sa loi 22 qui
reconnaissait deux langues
nationales, le français et
l’anglais, et qui permettait
l’usage d’une langue autre que
le français dans l’affichage.
Castonguay dénonce le
gouvernement Charest pour son
travail de sape contre le
français – qu’on pense à la
légalisation des écoles
passerelles, aux coupes dans les
budgets de francisation et aux
nominations partisanes à
l’Office québécois de la langue
française et au Conseil de la
langue française."
La notion de français
prioritaire est laxiste et
permet de répondre aux questions
en anglais lors des conférences
de presse. Je soutiens que les
journalistes anglophones qui
posent des questions en anglais
font un acte politique. Et ils
le savent. La preuve : pour être
un journaliste politique au
Québec, il faut savoir le
français. Alors pourquoi poser
des questions en anglais ?
Que des libéraux ou Denis
Coderre, comme des colonisés,
aient un orgasme quand ils
parlent l’anglais, ça se
comprend : ils croient toujours
que le Canada est un pays
bilingue et ils doivent parler
la langue des anglophones et
anglophiles ex-immigrants et
allophones qui les ont élus.
Mais que des indépendantistes le
fassent, n’est-ce pas choquant.
Ne croient-ils pas en la Charte
de la langue française ? Ne
doivent-ils pas montrer par
l’exemple que le français est la
langue de travail au Québec et
que le français est la langue
officielle du Québec !
Je me dis que seule
l’indépendance du Québec pourra
aboutir au français langue
commune de tous les Québécois.
C’est une fameuse de bonne
raison de vouloir faire du
Québec un pays.
Robert Barberis-Gervais,
Vieux-Longueuil,
mercredi 11 février 2015
barberis@videotron.ca
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