SorelTracy Magazine - Mercredi, 22 janvier 2025

Mardi 21 janvier, 2025

Par Jean Rajotte

MON GRAND-PÈRE MATERNEL et moi, un tandem heureux…

Par Jean Rajotte

Chacun de nous, à peu d’exception près, nous avons connu et côtoyé nos grands-parents. Certains ont développé une affection et une complicité spontanées avec l’un.e d’entre eux ou elles. Il n’y a pas d’explication rationnelle à cette merveilleuse et immédiate harmonie. C’est se sentir bien et important à ses yeux, en symbiose, tout bonnement. J’espère que la VIE vous a délivré ce beau cadeau.

Moi, j’ai eu la grâce et la joie de vivre cette relation de petit-fils avec son grand-papa.

Il s’appelait Zéphir, comme le vent doux, calme et réconfortant mentionné dans la mythologie grecque.

Il est né à Saint-Robert, joli village près de Sorel. Tôt, sa famille déménagea à Sorel dans la paroisse Saint-Pierre. En 1916, il épousa la très jolie et coquette Maria Thibault qui lui donna 3 belles filles, dont ma mère Isabelle. Il décéda en 1976 et ma peine fut immense et indéfinie. Je prononçai son homélie avec difficulté, mon cœur chaviré n’a pu retenir longtemps les sanglots. J’adorais mon grand-père.

Aussi loin que je me souvienne, j’avais à peine 4 ans « 1946 » quand ce grand, fort et beau personnage est entré dans mon univers. Il avait une large carrure, des mains énormes, une tignasse grisonnante et surtout de beaux yeux bleu azur. Son sourire un tantinet moqueur m’intriguait et me charmait à la fois, une tendresse s’en dégageait.

J’apprenais peu à peu à mieux le connaître. De cet homme émergeaient une tranquillité, une assurance et une FIERTÉ que j’ai tenté de faire mienne dans ma vie d’adulte.

À l’époque j’habitais à la Pointe-aux-Pins, c’est donc là que mon grand-père s’est amené. Il était veuf depuis 1933, sa femme décéda à l’âge de 39 ans, vraiment trop jeune. La guerre de 1939-45 terminée, celui-ci perdit son emploi à la Sorel Industries, il était maître-forgeron. À l’invitation de ma mère, il avait accepté, le temps de se « virer de bord », de venir chez moi pour quelque temps. C’est à ce moment-là que l’heureux « déclic » s’est manifesté entre moi et lui. J’ai découvert un être chaleureux, travaillant, taquin, enjoué, « raconteux » et vif d’esprit. Il sentait si bon, « l’eau de toilette », son mouchoir de poche en était imbibé.

Mon grand-père n’était pas venu à la maison pour se bercer dans l’attente de…

Un jour, il m’a dit : demain on va se dégourdir, nous irons couper des arbres dans le boisé avoisinant pour nourrir en bûches le poêle à bois. Le lendemain, alors que nous entrions dans le « bois », je marchais devant lui, ma hachette à la main, la neige à mi-jambe et il me gratifia d’une bonne jambette. Je tombai face dans la neige, me relevant tout d’un bond, la figure enneigée et cramoisie, en furie. Je le regardai et lui dis : « maudit grand-père ».

J’entends encore son GROS rire résonner. Tout partout dans le bois, même la cime des arbres fut surprise et décoiffée de leur trop de flocons de neige. Cette anecdote, il l’a racontée de nombreuses fois par la suite, avec toujours autant d’emphase et de fous rires contagieux.

Ce même hiver, il m’a appris à pêcher sur la glace du fleuve, creuser un trou, appâter l’hameçon… Quel bonheur, de ses beaux yeux perçants, il me regardait et me souriait, je sentais son amour. Nous étions les maîtres des lieux, fascinés par cette immensité bleutée qui s’offrait à nous. Au loin se profilait un lent brise-glace crachant une fumée noire qui avait obscurci le paysage hivernal.

Un autre bel après-midi, il m’emmena en traîne sauvage observer les « coupeurs de blocs de glace » sur le fleuve à l’embouchure de la rivière Richelieu. La plupart des travailleurs le connaissaient, « Salut, Zéphir, c’est ton petit-fils, eh oui! Il est très curieux, il voulait savoir à quoi servaient les blocs une fois coupés et embarqués sur les traîneaux. Il le sait maintenant, à la maison il y a une glacière… »

Le réfrigérateur tant publicisé et attendu fera son apparition l’année d’après, chez moi. Tranquillement le modernisme s’installa dans les chaumières, après la radio et son confrère « le tourne-disque », le grille-pain à ressort, la laveuse à linge automatisée, la cuisinière électrique, le réservoir à eau chaude, puis arriva le frigidaire, enfin… Quelques mois plus tard, mon grand-père nous a quittés. Il a ouvert une épicerie au coin des rues Provost et Albert « Sorel », je n’ai jamais oublié son séjour chez moi. D’ailleurs, je me rendais régulièrement le visiter avec ma mère à son commerce. J’avais grandi et, pour le plaisir, nous tirions au poignet.

À chaque fois que je le revoyais, mon cœur remuait et tanguait. Il était demeuré ce géant « tranquille et aimant », cet homme qui m’avait pris sous son aile avec tant d’AFFECTION et d’ATTENTION. LUI, qui m’avait appris tant de choses de la VIE. Que ferions-nous, grand-père, ensemble en 2025? Il serait émerveillé de tout, j’en suis assuré. Il est là, je sens son odeur et son aura de Bonheur. Voilà, mes amis.e, ce que j’avais à vous raconter de mon grand-père… Quelques passages de sa VIE, seulement… Sans doute cela fera surgir en vous des souvenirs, des émotions touchantes et inoubliables de certains de vos proches. Portez attention, ils sommeillent en vous, allez, il faut les révéler.

Éprouver de la nostalgie, à mon âge, ce n’est pas triste. C’est plutôt puiser dans la fontaine de mes souvenirs, de mes histoires. Ils agrémentent ma vie présente et ravivent encore et encore des sourires, toujours aussi complices.

Jean Rajotte

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